PARIS - Le 25 août 1944, après six jours d'insurrection populaire et l'entrée dans Paris de la 2e division blindée de Leclerc, avant-garde des troupes alliées, le drapeau blanc de la reddition remplaçait la croix gammée qui flottait depuis plus de cinquante mois sur la capitale française.
Le soulèvement de la population parisienne le 19 août devait changer la donne.

Le 18, alors que se multipliaient les mouvements de grève, notamment dans la police, le métro, la poste et la radio, des affiches étaient apparues sur les murs de la capitale, signées des francs-tireurs et partisans français (FTPF), composante d'obédience communiste des Forces françaises de l'Intérieur (FFI), appelant à la mobilisation générale contre l'occupant.
Dès le 18 au soir, une fusillade éclate près du pont des Arts, en plein
cœur de Paris, face au Louvre.
Le lendemain, des gardiens de la paix occupent la préfecture de police. Des mairies, des ministères, des sièges de journaux sont contrôlés par les FFI. Le Conseil national de la Résistance (CNR) et le Comité parisien de libération (CPL) lancent des appels à l'insurrection. Des combats éclatent, notamment pour le contrôle de la mairie de Neuilly.
Une trêve est conclue dans la soirée mais les combats se poursuivent le dimanche 20. L'Hôtel de Ville est occupé par la Résistance.
Grâce notamment à l'intervention du consul de Norvège Raoul Nordling et du président du conseil municipal de Paris, Pierre Taittinger, 3.200 prisonniers politiques sont libérés, une nouvelle trêve est décidée mais elle ne fait pas l'unanimité au sein de la Résistance. Des affrontements sporadiques se poursuivent.
Le 21, le CNR décide de rompre la trêve et des barricades sont érigées dans plusieurs quartiers de la capitale. Le 22, les combats s'intensifient.
Les forces alliées sont à une centaine de kilomètres. De crainte de représailles allemandes qui transformeraient la ville en un champ de ruines, après bien des hésitations de la part du commandement américain, la 2e DB est finalement autorisée, le 22 août au soir, à foncer sur la capitale pour prêter main forte aux FFI.
Décision hautement symbolique que de laisser des soldats français entrer les premiers dans Paris, et qui satisfait le général de Gaulle, soucieux d'asseoir son autorité sur les territoires libérés où l'influence des communistes est souvent prépondérante.
"PARIS LIBERE PAR LUI-MEME"
Le commandant des 16.000 soldats allemands encore stationnés à Paris, le général Dietrich von Choltitz, convaincu de la chute inéluctable de la ville, poursuit l'évacuation de ses forces. Avec ses chars, il est en mesure d'écraser l'insurrection mais, tout en multipliant les menaces, il ignore les ordres du QG du Führer de faire sauter les ponts et d'opérer le maximum de destructions dans Paris.
Le 24 août au soir, les premiers chars de la 2e DB, qui ont dû livrer de violents combats, notamment près de la prison de Fresnes, atteignent Paris.
La compagnie du capitaine Raymond Dronne, composée en majorité de républicains espagnols, est lancée en avant-garde et arrive à 21h22 place de l'Hôtel de Ville, vite accueillie par une foule en délire.
Le lendemain matin, les unités de la 2e DB, appuyés par les GI'S de la 4e division d'infanterie US, se déploient dans la ville.
Des panaches de fumées s'élèvent de plusieurs points de la capitale et les îlots de résistance allemands se rendent un à un, souvent après d'âpres combats, comme au ministère des Affaires étrangères et au Luxembourg.
A 15h30, Leclerc reçoit à la préfecture de police la reddition du général Von Choltitz.
Il se rend à son QG de la gare Montparnasse pour parapher avec des chefs de la Résistance le document. Arrivé sur place,
De Gaulle s'étonne de voir le nom de Rol-Tanguy au bas de la reddition allemande.
Les derniers points d'appui allemands se rendent vers 20h00 et De Gaulle prend la parole à l'Hôtel de Ville.
"Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! Mais Paris libéré ! Libéré par lui-même, libéré par son peuple, avec le concours des armées de la France, avec l'appui et le concours de la France tout entière, de la France qui se bat, de la seule France, de la vraie France, de la France éternelle", lance-t-il pour la postérité.
Le 26 août, parmi des centaines de milliers de Parisiens en liesse, il descend les Champs-Elysées puis se rend à la cathédrale Notre-Dame.
A Notre-Dame, une mystérieuse fusillade éclate. Tireurs embusqués, provocation ou simple méprise ? Alors que les tirs résonnent sur le parvis, De Gaulle reste impassible.
Les combats pour la libération de Paris ont fait environ 900 morts parmi les résistants, 500 dans la population civile, 150 dans les rangs de la 2e DB. Côté allemand, on dénombre 3.200 morts.
Parmi les drames les plus désolants, gardons en mémoire le souvenir de 35 garçons et filles qui avaient maladroitement confié à un agent double leur désir de combattre. Dans la nuit du 16 au 17 août, ils furent livrés par celui-ci à la Gestapo (police allemande) qui les fusilla sans délai près du lac de Boulogne.
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