La Gestapo c'était quoi ?
Qui sont les hommes de la Gestapo ? Au départ, cette police secrète est composée non pas de nazis mais de policiers professionnels qui ont servi le régime précédent, la République de Weimar. Ils ont été formés dans le cadre d’une démocratie, habitués à respecter le droit et la loi ; beaucoup ont une formation universitaire, sont des gens cultivés et ont le sentiment d’appartenir à une élite. Pas l’élite bourgeoise, qu’ils méprisent, mais celle des « inconditionnels ». Ils se voient bientôt, selon l’image suggérée par Heydrich, comme une administration en lutte, comme des chirurgiens chargés de débarrasser le corps social allemand de tous ceux qui le gangrènent : les opposants politiques (sociaux-démocrates, socialistes, communistes), les « asociaux » (homosexuels, prêtres rebelles) et bien sûr les juifs, que le régime a décidé d’exterminer. Outre les arrestations sauvages et la torture, l’une des méthodes préférées de la Gestapo est la dénonciation. Les témoins interrogés dans le film décrivent très justement l’atmosphère d’intimidation et de délation qui se met en place dans le pays et qui s’étendra bientôt au-delà de ses frontières.
Heydrich
La Geheime Staatspolizei, créée par Hermann Goering en 1933, n’est à l’origine qu’une sous-division de la police judiciaire, issue de la police politique mise en place sous la République de Weimar. Après 1933, la Gestapo émerge très vite comme l’instrument de répression privilégié du nouveau régime : dès le 27 février 1933, deux jours après l’incendie du Reichstag, commencent les épurations. Lorsqu’en 1943 la Gestapo passe sous la direction de Himmler et de Heydrich, elle devient la police politique de l’empire SS. Sa participation à l’élimination du chef des SA, Ernst Röhm, confirme son allégeance absolue à Hitler et renforce sa position. Elle est désormais la pièce maîtresse du système policier du Reich…
SA-Führer
Ernst Röhm
Police secrète de l’État nazi, contraction du mot allemand Geheime Staatspolizei. Ce nom générique de Gestapo a été utilisé par les Français occupés pour désigner à tort des organismes aussi différents que l’Abwehr (service de contre-espionnage de l’armée allemande, dirigé par l’amiral Canaris); la Kriminalpolizei, ou Kripo (police criminelle); le Sicherheitsdienst ou SD (Service de renseignements de sûreté, d’espionnage et de contre-espionnage du parti et des SS); ou encore la Sicherheitspolizei, ou Sipo (police de sûreté, faisant partie de la SS). En réalité, la Gestapo n’est que l’organe exécutif du SD et de la Sipo. Créée par décret de Goering en 1933, passée en 1934 sous l’autorité de Himmler, Reichsführer SS, et en fait sous celle de son redoutable adjoint Heydrich, elle est dirigée du commencement à la fin du IIIe Reich par Heinrich Müller. La Gestapo est composée, au départ, non de nazis, mais de policiers professionnels qui ont servi la République de Weimar et qui passent sans aucune difficulté au service de l'Etat nazi. Tel est le cas de son chef, Heinrich Müller, nommé à la tête de la Gestapo en 1935 après une longue carrière dans la police politique de Weimar et qui n'adhère au parti nazi qu'en 1939. Il n'en reste pas moins que la Gestapo est une pièce maîtresse de l'appareil de répression aux mains des nazis.
Dans l’énorme machine policière SS construite par le duo Himmler-Heydrich, la Gestapo prendra une part considérable à l’asservissement de l’Autriche, de la Tchécoslovaquie et de la Pologne, en dépit des protestations de certains généraux de la Wehrmacht. La Gestapo s’installe dès août 1940 dans la France occupée. Toutefois, les chefs militaires d’occupation la cantonnent dans un rôle de renseignement et de propagande, sans pouvoir d’exécution.
Ce n’est qu’en avril 1942 que Himmler obtiendra du Führer que les pouvoirs de police en France soient enlevés aux militaires et confiés au général de police SS Karl Oberg. La Gestapo va alors absorber les services militaires de la police secrète de campagne, renforcer considérablement l’action de ses quelque 1 500 policiers allemands par le concours de plus de 40 000 auxiliaires français de tous les milieux, dont les plus tristement célèbres sont ceux de la bande Bonny-Lafont, de la rue Lauriston à Paris.
Heinrich-Himmler
La Gestapo procède à un nombre considérable d’arrestations (40 000 en 1943) sans compter des rafles massives comme à Clermont-Ferrand, Marseille, Grenoble et Cluny; elle incarcère ses victimes à Fresnes, à la Santé, au Cherche-Midi, en province dans les prisons locales. L’usage de la torture lui a été recommandé dès le 10 juin 1942 par une note de Berlin relative aux «interrogatoires renforcés» dont elle se fait une spécialité.
Les incarcérés qu’elle juge mineurs sont dirigés comme «réserve d’otages» au camp de Romainville et alimentent les exécutions d’otages, notamment celles du Mont-Valérien. Les incarcérés qu’elle juge majeurs sont envoyés, ainsi que les juifs raflés en masse, dans les camps de concentration ou d’extermination en Allemagne.
Les mêmes faits se reproduisent dans les autres pays de l’Europe occupée.
A Lyon, le SS Klaus Barbie, chef de la Gestapo, s'est rendu célèbre pour les arrestations et tortures de résistants (Jean Moulin torturé à mort en 1943) et les arrestations de Juifs (les enfants d'Izieu, déportés et assassinés à Auschwitz).
Klaus Barbie
La Gestapo comme organisation a été, jugée par le tribunal de Nuremberg et condamnée. Le fait même d'en avoir fait partie est considéré comme criminel.
« Chaque balle qui sort maintenant du canon d'un pistolet de police est ma balle. Si vous appelez ça un meurtre, c'est moi qui suis le meurtrier. J'ai ordonné tout cela. J'y apporte mon soutien. J'assume cette responsabilité et je n'en ai pas peur »
Hermann Goering, février 1933
Pour Paris: Kurt Lischka
Lischka, Kurt (directeur de la Reichszentrale pour l'émigration des Juifs en 1939 ; puis dans la Police de sécurité en France) : condamné par contumace à la prison à perpétuité en France en 1950. Fondé de pouvoir (Prokurist) de la société Krücken de Cologne. Retrouvé et dénoncé par Serge et Beate Klarsfeld dans les années 70. Serge et Beate Klarsfeld tentent de l'enlever et sont condamnés par des tribunaux allemands. De jeunes juifs viennent briser par deux fois les vitres de la façade de son bureau et sont jugés par des tribunaux allemands en 1975 et 1976. Condamné à dix ans de prison par le tribunal de Cologne en 1980.Kurt-Lichka résidait à Paris rue des Saussaies dans le 8ème arrondissement
Une jeune femme belge, informatrice de la Gestapo a essayé de ce caché dans la foule ! Mais elle a été reconnue par des témoins
« Une des tâches les plus urgentes qui nous incombent est de découvrir tous les ennemis déclarés ou cachés du Führer et du nazisme, de les combattre et des anéantir. Pour accomplir cette tâche, nous sommes prêts à verser non seulement notre sang, mais aussi celui des autres.»
Heinrich Himmler, 1er janvier 1934
« Article 1er : La Gestapo a la tâche de rechercher toutes les intentions qui mettent l'État en danger, et de lutter contre elles, de rassembler et d'exploiter les résultats des enquêtes, d'informer le gouvernement, de tenir les autorités au courant des constatations importantes pour elles et de leur fournir des impulsions.»
Loi fondamentale de la Gestapo,
10 février 1936
Fin 1944, la Gestapo a recentré ses actions sur l’Allemagne. En 1945, dans l’ambiance d’apocalypse qui marque les derniers mois du Reich, la machine à semer la terreur échappe à tout contrôle. Plus la fin approche, plus il est risqué, que l’on soit militaire ou civil, d’exprimer le moindre doute sur la « victoire finale ». Le simple bon sens passe pour du défaitisme. Et la Gestapo pour qui, désormais, chacun est un coupable potentiel, frappe à coups redoublés. Cela n’empêche pas la plupart de ses hommes, des hauts dirigeants aux simples fonctionnaires, de se préparer à l’après-guerre. Ils effacent les traces de leurs agissements, détruisent les preuves de leurs exactions. Après 1945, il ne reste qu’une infime partie des milliers de dossiers constitués par la police secrète. Les hommes de la Gestapo changent d’identité ou prennent la fuite, grâce à des réseaux d’entraide qui leur permettent de gagner des pays sûrs, pour la plupart en Amérique latine. Ceux qui n’ont pas quitté l’Allemagne font valoir, quelques années après la fin de la guerre, leur statut de fonctionnaire. Ils sont réintégrés, souvent à des postes de commandement. Chez les Alliés, après quelques procès difficiles à instruire et quelques exécutions, le pragmatisme l’emporte. Bon nombre d’anciens de la Gestapo trouvent à s’employer dans les services secrets de divers pays. Au grand dam des « chasseurs de nazis », comme Simon Wiesenthal, et de tous ceux qui n’acceptent pas que ces criminels échappent aux poursuites.
Simon
Wiesenthal
Monsieur,
Simon Wiesenthal
Pour chasseur autrichien de criminels nazis, Simon Wiesenthal est né en 1908 à
Buczacz (Pologne). Après des études d'architecture à Prague et à Lvov, il
travaille comme architecte jusqu'à la 2e guerre mondiale, où il est interné
dans des camps de concentration nazis. Après la guerre, il se consacre à la
chasse aux criminels nazis et à l'aide aux victimes juives du nazisme. Il crée
le Centre de documentation historique juive à Linz puis à Vienne, et patronne
des centres du même type en dehors de l'Autriche, notamment aux Etats-Unis. Il
a publié, entre autres, «KZ Mauthausen», «Les assassins parmi nous», «Justice
et non vengeance». Il a pris sa retraite en 2003.