Pierre Virlogeux
Pierre Virlogeux, dit Vernier, époux de Claude Rodier, ingénieur céramiste, chef
d’entreprise, commandant des MUR (Mouvements unis de la Résistance) d’Auvergne,
né le 21 janvier 1903 à Cérilly (Allier) et mort le 9 février 1944 à Riom
(Puy-de-Dôme), fut jusqu’à son décès dans les geôles du SD (Sicherheitsdienst)
de Clermont-Ferrand, un des principaux chefs de la Résistance française en
Auvergne, pendant la Seconde Guerre mondiale.
Pendant la Seconde Guerre mondiale
Entrée en résistance
Il est assez rare de pouvoir documenter l' « entrée en Résistance » d'une
personne. S'agissant de Pierre Virlogeux, celle-ci est documentée. Elle a lieu
dès 1940, quand l'Université de Strasbourg trouve refuge à Clermont-Ferrand.
Pierre Virlogeux accueille alors un couple d'enseignants des Vosges d'origine
Juive, dont la femme était condisciple de Claude Rodier à l'École normale
supérieure de jeunes filles de Sèvres, et le mari en contact, depuis le début de
la Guerre, avec les services secrets britanniques.
Si l’affiliation originelle aux réseaux du Special Operations Executive (SOE) —
et plus particulièrement aux réseaux Buckmaster (SOE en France) — est avérée, un
doute existe sur le nom exact du réseau dont Pierre Virlogeux était membre. Tout
porte à croire qu'il s'agissait du Réseau Alibi, d'autres riomois, dont le maire
de Riom (1965-1971), ancien résistant, ancien déporté au camp de Buchenwald, lié
à la famille famille Virlogeux, acteur des hommages rendus par la Ville, Guy
Thomas, fut un membre attesté.
Actions de résistance
L'activité durant la période qui va de 1940 à fin 1942 n'est a priori pas
documentée.
Virlogeux prend part activement à la création des Mouvements unis de la
Résistance, finalisée en janvier 1943 et qui, dans le cadre de la réunion des
principaux mouvements de résistance de la zone sud, donna naissance aux MUR
d'Auvergne.
À cette date, la zone sous sa responsabilité s'étend de Riom, au sud, à
Cosne-d'Allier, au nord, à La Souterraine à l'ouest, un territoire un peu plus
vaste que les Combrailles. Vichy, siège de l' « État français » et
Clermont-Ferrand sont tout proches.
Arrestation
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L'arrestation du point de vue du SD
Interrogatoire de Georges Mathieu, Affaires Mathieu et autres, Clermont-Ferrand,
16 septembre 1944"
“Expédition dans le région de Riom :
D'une part, les interrogatoires du commandant Madeline et de l'adjudant (de
gendarmerie) Dodinet, d'autre part, les archives de Saint-Maurice (il s'agit de
la fameuse serviette d'Emile Coulaudon, trouvée le 11 décembre 1943, au château
de Saint-Maurice, près de Billom, comportant la liste des camps et dirigeants
des MUR du Puy-de-Dôme, avec leurs vrais noms et leurs pseudonymes, et bien
d'autres choses encore) nous donnèrent les renseignements nécessaires.
Dodinet qui était originaire de Riom, donna les noms de Perol, Virlogeux,
Passemard, Robin. Les archives de Saint-Maurice avaient fourni les noms de
Laborier, Marconnet et Labrousse, le capitaine de gendarmerie (Berger), et de
Raynaud. Enfin, un renseignement du SB (Sonderkommando Blumenkampf, du nom de
son chef, arrivé à Clermont en octobre 1943) avait signalé Chouvy.
On devait aller non seulement à Riom mais à Ennezat où les dirigeants du M.U.R.
devaient être arrêtés.
Le 8 février, le SD au complet partit pour Riom. Immédiatement fut arrêté le
nommé Chouvy. A 5 heures les opérations commencèrent. Dodinet guida la Gestapo.
On arrêta Virlogeux avec toute sa famille, Laborier, Perol, qui nous avait été
montré par Dodinet alors qu"il se trouvait sur la place de la Fédération. A la
maison centrale, le gardien Passemard nous échappa. Ensuite furent arrêtés
Marconnet, Labrousse et le capitaine de gendarmerie. Ensuite, on se rendit chez
Robin qui était en fuite. Raynaud avait été oublié et les perquisitions ne
donnèrent aucun résultat.
A 5 heures (du soir ?) on interrogea les prisonniers. J'allai voir si le nommé
Menut, alias Benevol (Max Menut était déjà dans le Cantal), n'était pas chez lui
mais il était en fuite. Nous arrêtâmes l'abbé Anneser.
L'arrestation, le témoignage de Jean Virlogeux
Jean Virlogeux, fils aîné de Pierre Virlogeux, a fêté son 17ème anniversaire, le
4 janvier 1944. Après avoir tenté, l'année précédente de rejoindre le maquis et
ramené "manu-militari" par des amis de son père à la maison, il suit celui-ci
dans ses actions comme "estafette", participe à la récupération de
parachutages...
Arrêté avec son père, le 8 février 1944, il témoigne :
"le 8 février 1944, alors que je dors tranquillement dans ma chambre au deuxième
étage de la maison de mes parents, je suis brusquement réveillé par une jeune
femme (Ursula Brandt) avec un fort accent allemand, qui pistolet au poing, me
fit lever, habiller et descendre au premier étage où je trouvais mon père
encadré par deux agents de la Gestapo, mitraillette braquée sur lui, tandis que
dans la chambre de mes parents, ma mère finissait de s'habiller sous la menace
d'un pistolet tenu par celui qui menait les opérations, un français, ancien de
Saint-Cyr, devenu chef de la Gestapo pour la région de Clermont-Ferrand. Il
était six heures du matin... ...
Nous fûmes rapidement transférés en voiture à la caserne principale de Riom
aujourd'hui Lycée Claude et Pierre Virlogeux], et placés dans les cellules du
quartier disciplinaire. Je pus communiquer avec mon père qui se trouvait dans la
cellule à côté de la mienne et il me recommanda alors de jouer l'innocent, lui
se chargeant de dire à la Gestapo qu'il était le seul de la famille à faire
partie du réseau. La Gestapo avait également arrêté la bonne de mes parents
ainsi que mes grands-parents maternels et mon frère alors âgé de onze ans,
lesquels habitaient dans une villa à cinquante mètres de la maison de mes
parents, ce qui laisse penser que la Gestapo était très bien renseignée sur le
disposition des lieux.
Ce jour-là, la Gestapo arrêta quarante-trois personnes à Riom, étant très bien
renseignée grâce à des documents tombés entre leurs mains quelque temps
plutôt...
...En fin d'après-midi, je fus emmené dans un bâtiment où la Gestapo s'était
installée pour procéder aux premiers interrogatoires. En arrivant dans le
bâtiment je vis mon père traîné par deux soldats allemands, il ne pouvait plus
marcher et avait la figure en sang. C'était la dernière fois que je devais le
voir et je n'ai jamais su s'il m'avait reconnu.''
Le Kommando du SIPO-SD
En février 1944, le SIPO-SD (Sicherheitspolizeide Clermont-Ferrand est commandé
par Paul Blumenkampf, un ancien boucher reconverti dans la police politique,
secondée par une secrétaire, ancienne étudiante allemande de l'Université de
Strasbourg repliée à Clermont-Ferrand, Ursula Brandt, dite "La Panthère" (en
raison d'un manteau qu'elle portait régulièrement).
Le SIPO-SD peut, pour des opérations importantes comme la rafle contre les
étudiants-résistants de l'Université de Strasbourg repliée à Clermont-Ferrand,
faire appel aux forces de police politique ou militaire de l'occupant allemand.
Dans le cadre de l' "aktion" du 8 février 1944, si la présence d'Ursula Brandt
est avérée, le sonderkommando du SIPO-SD est uniquement constitué de
collaborateurs français dont les principaux sont Georges Mathieu et Jean
Vernières.
Georges Mathieu, étudiant en lettres de l'Université de Clermont-Ferrand, aurait
passé le concours de Saint-Cyr, infiltre les mouvements de Résistance
d'Auvergne, principal responsable du démantèlement du réseau constitué par les
étudiants de l'Université de Strasbourg repliée à Clermont-Ferrand, Chef du
Sonderkommando français du SIPO-SD de Clermont-Ferrand, responsable à ce titre
de plusieurs dizaines d'arrestations. Fusillé à la Libération.
Jean Vernières, né à Clermont-Ferrand, requis au STO, à l'occasion de visiter
Auschwitz comme "mouton", de retour en Auvergne s'engage au service du SD "par
idéal anti-communiste", réputé pour sa cruauté dans les interrogatoires. Fusillé
à la Libération.
Le suicide de Pierre Virlogeux
Arrêté vers 6 h du matin (heure allemande), Pierre Virlogeux est amené dans sa
cellule du quartier disciplinaire de la
Caserne d'Anterroche, en fin de journée,
les membres brisés (Jean Vernières a pris sa part aux tortures). Dans les
cellules contiguës se trouvent son fils aîné, Jean, et l'instituteur Charles
Chouvy arrêté dans la même rafle.
Jean Joseph Félix Vernières (1er mai 1921 à
Clermont-Ferrand - 1944) est un agent du Sipo-SD de Clermont-Ferrand, fondé par
Georges Mathieu, pendant la Seconde Guerre mondiale.
C'est ce dernier, qui au retour de déportation (Auschwitz et Buchenwald,
témoignera, dans une lettre manuscrite datée du 21 mai 1945 (Jean Virlogeux ne
rentrera de déportation que le 26 juin 1945), des derniers instants et des
derniers mots de Pierre Virlogeux : « Il m’est impossible d’en garantir, d’une
façon absolue, le mot à mot, mais, sur l’honneur, je peux certifier que je n’en
déforme pas l’esprit : « Le moment est venu. Je vais mourir. J’ai fait mon
devoir. Tranquillisez les amis, je n’ai rien dit. Mes fils peuvent porter la
tête haute. Adieu ! Vive la France ! » »
Pierre Virlogeux s'était ouvert les veines avec le verre brisé de ses lunettes
et pendu avec un lacet.
Le corps est enfoui, avec un autre cadavre, dans un puisard de la caserne. Les
tortionnaires mêlent aux remblais qui comblent le trou des quartiers de viande
de bœuf.
Lors de son interrogatoire, Georges Mathieu affirmera dans un premier temps
ignorer où est le corps, avant d'en indiquer la localisation.
Après l'exhumation, les restes de Pierre Virlogeux sont placés dans un caveau
décoré de carreaux de grès flammés, dans le « nouveau » cimetière de Cérilly,
dans l'Allier.
Après-guerre
Reconnaissance
Après la guerre, la municipalité de Riom fait rebaptiser l'avenue qui conduit du
centre ville à la gare SNCF Riom-Châtelguyon « avenue Virlogeux ». Au long de
cette avenue est érigé le monument en hommage à Claude Rodier et Pierre
Virlogeux, fait d'une pierre taillée en forme de menhir, sur un socle en
carreaux de grès flammés, portant en son centre un médaillon réalisé par Pierre
Virlogeux représentant Claude Rodier de profil, et surmonté d'un buste
auto-portrait de Pierre Virlogeux. Le jardin public du XIXe siècle qui borde
cette avenue est également renommé « square Virlogeux ». Enfin, le lycée public
construit sur l'emprise de la Caserne d'Antherron où se suicida Pierre Virlogeux
et où son corps fut caché par le SD de Clermont-Ferrand est baptisé « lycée
Pierre et Claude Virlogeux ».