N'OUBLIONS JAMAIS

 

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TIRAILLEURS

 

CRESSONSACQ - 9 et 10 juin 1940.


8 officiers français massacrés avec leurs tirailleurs…
Depuis le 24 mai 1992, chaque année la commune de CRESSONSACQ rend hommage aux Officiers français et aux tirailleurs sénégalais assassinés par l’ennemi au Bois d’Eraine….mais que sait-on de ce fait de guerre…

Extrait de l’allocution prononcée le 24 mai 1992 par le Colonel (ER) BOUGRAT Président de l’Amicale des Anciens des 2ème RIMA, 2ème RIC, 2ème BFL et des TDM de la Sarthe….

« Début mai 1940, les Panzerdivisions allemandes percent à SEDAN et galopent vers la mer par AMIENS, encerclant les armées françaises et alliées engagées en Belgique.

Le commandement français tente alors une percée en direction de la SOMME pour rompre cet encerclement et retrouver la liaison avec ses armées du Nord.

Dans le cadre de cette manœuvre, la 4ème division d’Infanterie Coloniale formée des 2ème RIC, 16ème et 24ème RTS pour l’infanterie, est ramenée d’Alsace dans la région d’AMIENS où elle est engagée vers le Nord du 23 au 28 mai.

Pour contrer cette manœuvre les allemands réagissent vigoureusement et dès le 5 juin détruisent les divisions encadrantes de la 4ème DIC laissant celle-ci en flèche de 15 km.

Par ailleurs, c’est aussi l’échec de la contre-offensive française.

Dans la nuit du 6 au 7 juin, la 4ème DIC qui tenait toujours fermement ses positions reçoit l’ordre de se replier pour se rétablir sur la ligne AILLY, BRACHE à 20 km au sud d’AMIENS.

C’est chose faite dans la matinée du 7 juin.

Cette première phase des combats est déjà très meurtrière puisqu’elle a coûté près de 600 tués. Ces lourdes pertes traduisent la violence des combats et la vaillance des coloniaux.

Le 8 juin, la 4ème DIC est à nouveau débordée par l’ouest sur sa gauche. En effet, les allemands percent sur l’axe BRETEUIL, SAINT JUST EN CHAUSSEE, CLERMONT qu’ils atteignent dans l’après-midi.
La 4ème DIC risque l’encerclement par le sud, d’autant qu’à l’est, sur sa droite, une colonne ennemie progresse de PERONNE vers ESTREES SAINT DENIS.

Le repli commence. Mais il relève bientôt da la mission impossible. On demande à ce qui reste de la Division, au combat depuis trois semaines, et sans renfort, ni relève bien sûr, d’aller à pied plus vite que les motorisés allemands.

Et ce qui devait se produire arrive. La colonne allemande de l’ouest converge de CLERMONT vers ESTREES SAINT DENIS pour effectuer sa jonction avec celle de l’est dans l’après midi du 9 juin.

L’encerclement de la 4ème DIC est chose faite.

Son calvaire commence.

En cette fin d’après midi du 9 juin, ce qui reste des 2 bataillons encore existant du 2ème RIC et 1 bataillon du 16ème RTS sont bloqués dans les bois de MORLIERES et à BRUNVILLERS, au nord de SAINT JUST EN CHAUSSEE. Les survivants des autres bataillons du 16ème RTS et le 24ème RTS sont encerclés dans la région de RAVENEL et ANGIVILLERS dans le nord d’ERQUINVILLERS.

La nuit du 9 au 10 juin, rude, sera celle des derniers combats et de la fin du 4ème DIC.

Quoique très épuisés, les éléments encerclés effectuent en début de nuit une attaque massive vers le sud pour sortir de la passe d’ANGIVILLERS et tenter de rejoindre les lignes françaises dont l’emplacement exact est d’ailleurs inconnu en raison de la rupture des contacts et des liaisons radio.

Les tentatives en direction de LIEUVILLERS par le 16ème RTS et de RAVENEL par le 2ème RIC échouent. Les pertes sont très importantes.
Les derniers éléments organisés des 2ème RIC, 16ème et 24ème RTS se heurtent aux allemands qui tiennent les villages de CRESSONSACQ et ERQUINVILLERS.

Les combats y sont âpres et les pertes sévères.

Le 10 juin au matin, les allemands incendient ERQUINVILLERS et après une dernière lutte les rescapés doivent se rendre.

Le calvaire va se transformer en martyre pour les tirailleurs sénégalais.
Les prisonniers sont désarmés. Un tri systématique est fait, d’une part les Blancs, d’autre part les Noirs. On abandonne les premiers pour un instant. Les tirailleurs valides et ceux, qui bien que blessés peuvent marcher, sont rassemblés et abattus à la mitrailleuse. Ceux qui tentent de s’enfuir sont tirés individuellement au fusil. Les blessés intransportables sont achevés sur place au pistolet.

Les éléments qui ont réussi à se glisser à travers les lignes allemandes sont peu à peu capturés les jours suivants. Les allemands continuent à fusiller systématiquement les tirailleurs.

Seuls quelques isolés de ces durs combats parviennent à franchir l’Oise et à rejoindre les lignes françaises.

Ainsi s’achève à CRESSONSACQ et ERQUINVILLERS l’épopée de la 4ème DIC, après avoir payé un lourd tribu. »

Extrait du bulletin de liaison des anciens de la 4ème DIC N°2 :
« Les éléments qui ont obliqué cers l’est pendant l’attaque ont souvent réussi à s’infiltrer entre NOROY et ERQUINVILLERS. Mais ils seront progressivement capturés par l’ennemi…. La 4ème DIC laisse un millier de morts, dont plus de six cents sénégalais. Parmi ces morts mention spéciale doit être faite des huit officiers qui reposent dans le cimetière de CRESSONSACQ : du 24ème RTS, commandant BOUQUET, capitaine RIS, lieutenants, ERMINY, PLANCHON, ROTELLE et ROUX; du 16ème RTS, capitaine SPECKEL et lieutenant BROCARD et les tirailleurs Faya LANO et Aka TANO »

Extrait de « MASSACRE DES SENEGALAIS DE LA 4ème DIC :
« …Alors tandis que l’on exécute les tirailleurs un à un, les officiers sont emmenés. Nul ne les reverra plus vivants. Plus tard un paysan découvrira à la corne du bois d’ERAINE une fosse commune, six cadavres y sont alignés, tous portent un trou à la tempe. Le commandant BOUQUET, le Capitaine SPECKEL ont été assassinés avec leurs six camarades (capitaine RIS, Lieutenants BROCARD, ERMINY, PLANCHON, ROTELLE et ROUX) pour avoir voulu sauver la vie de leurs Tirailleurs dont Faya LANO et Aka TANO.

Leur geste d’officiers français ne répond-il pas à celui du Capitaine T’CHORERE qui dans la Somme était abattu pour avoir voulu se joindre aux Officiers blancs ?

L’armée coloniale peut être fière d’avoir su susciter de tels sacrifices. Quelle que soit la couleur de la peau sous le signe de l’Ancre, elle n’a qu’une seul âme, elle ne sert qu’une seule patrie : La France. »

Citation (ordre n° 1.525 C)

SPECKEL – 16ème RTS : Officier de grande valeur, qui par sa haute autorité, la droiture de son caractère et son exemple de chaque instant a su faire de son bataillon une unité manœuvrière de premier ordre et lui imprimer un bel esprit offensif.

Galvanisant ses unités par son énergie personnelle a obtenu d’elles pendant toute la période du 23 mai au 9 juin 1940 au cours des combats de FOUILLOY et de VILLERS BRETONNEUX de magnifiques efforts.
Le 9 juin 1940, se trouvant encerclé par un ennemi très supérieur en nombre, a combattu jusqu’à son dernier souffle et est tombé mortellement blessé pour la France faisant le sacrifice de sa vie pour sauver ses tirailleurs.



Le monument érigé au Bois d’Eraine porte le nom des Officiers et des tirailleurs Aka TANO et Faya LANO et le poème écrit le 22 juillet 1941, sur les lieux même du massacre, par Jean SAUVAJOL neveu du Lieutenant PLANCHON dont voici le texte intégral :

 

PAX

A l’orée du grand Bois, sous les frondaisons calmes
Ils ont dormi un an, côte à côte, ignorés
Et la houle des blés, par les vents balancés
Chaque soir les berçait d’une feuille de palme.

Nos pensées angoissées les cherchaient ardemment
Et nos Espoirs têtus, en écartant le Doute
S’obstinaient. Chaque soir aux Croix de notre Route
La Prière montait, long Cri d’Amour Fervent.

Au grand Soleil de Juin, ils nous sont Revenus.
Ils ont cessé enfin d’être des Inconnus.
Et soudain, les voici, plus purs, plus familiers.

Plus vivants même et plus près de Nous que Jamais.
Et leurs yeux apaisés disent dans leur langage
« Pour la Patrie, pour nos petits et pour nos Vieux, Courage ».

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