Bataille de l'eau lourde
L'eau lourde est un composant essentiel pour réussir une réaction en chaine.
Elle permet de ralentir les neutrons issus de réactions de fission nucléaire,
qui ont de ce fait une plus grande probabilité de provoquer de nouvelles
fissions de noyaux d'uranium et créer ainsi une réaction en chaine.
Centrale en Norvège
Pendant la Seconde Guerre Mondiale, la seule usine capable de produire cette eau
lourde est située en Norvège. Les anglais ont appris son existence grâce à leurs
espions et à la résistance norvégienne. Cette centrale hydro-électrique se nomme
Norsk Hydro, du nom de la société qui l'exploite et se situe à Vemork.
Usine de Vemork
Le terme « bataille de l'eau lourde » désigne cinq opérations militaires
successives menées par les Alliés durant la Seconde Guerre mondiale afin de
détruire une usine productrice d'eau lourde en Norvège, dans le cadre de la
course à la bombe.
Opérations
L’opération française
En février 1940, Joliot-Curie et Kowarski sont prêts pour une expérience
décisive. La France détient alors un stock d'uranium obtenu dès 1939 par Joliot,
mais elle ne possède que quelques grammes d'eau lourde (oxyde de deutérium),
indispensable en grande quantité pour jouer le rôle de « ralentisseur » dans
l'expérience que les deux savants ont imaginée.
La Société norvégienne d'azote a réussi à fabriquer dans son usine
hydro-électrique de Vemork (commune de Tinn, Comté de Telemark), situé à 120 km
à l'ouest d'Oslo, dans la Norvège encore neutre, 185 kg de ce précieux liquide,
qui constitue l'unique stock mondial.
Raoul Dautry, ministre français de l'Armement confie alors au Deuxième Bureau, à
la veille de l’invasion de la Norvège par les Nazis dont le but principal est de
s'emparer de ce stock, la très délicate mission de prendre les Allemands de
vitesse et de rapatrier le stock mondial d'eau lourde.
Au début du mois de mars, le commandant Perruche, chef du service des
Renseignements envoie d'abord un officier de réserve du service des Poudres : M.
Allier, pour négocier l'achat du stock auprès de la Société d'azote norvégienne.
Cette dernière, farouchement opposée aux Allemands, cédera gratuitement — en
prêt — l'intégralité de l'eau lourde (encore utilisée au Canada, elle sera payée
après la guerre). Trois agents sont alors dépêchés en hâte à la légation
française de Stockholm, le capitaine Muller, le lieutenant Knall-Demars et le
lieutenant Mossé.
Ils vont avoir la mission difficile de déjouer la surveillance des services de
renseignements allemands déjà sur place, et de rapatrier ce stock le plus
discrètement et le plus rapidement possible, alors que toutes les voies de
communication sont contrôlées par les Nazis et que chaque liste de passagers est
scrupuleusement surveillée.
En février 1942, les Alliés obtiennent des renseignements donnant à penser que
les Allemands essayent de mettre au point une bombe atomique. Pour réaliser ce
projet, les spécialistes considèrent qu'il est indispensable de disposer d'oxyde
de deutérium, plus connu sous le nom d'eau lourde. Il s'avère justement que les
Allemands en continuent la production dans l'usine hydro-électrique de Vemork.
Un agent norvégien, sur place, informe les autorités britanniques de l'évolution
de la situation. La décision est prise de faire détruire l'usine par un
commando.
Il ne faut pas oublier la participation des sous-marins français, basés à Dundee
:
Regroupées dans la IXe Flottille britannique, la Junon et la Minerve sont
employées dans des missions de patrouille et de protection dans la bataille pour
les convois de Mourmansk. Régulièrement, elles mènent des opérations spéciales
de débarquement de commandos et de matériel au profit de la résistance
norvégienne. C'est notamment dans ce cadre que le 11 septembre 1942, la Junon
participe à la bataille de l'eau lourde. Il s'agit d'empêcher l'Allemagne
d'obtenir les composantes nécessaires à la fabrication d'une arme atomique. Le
sous-marin FNFL dépose un commando chargé de faire sauter une usine. La mission
est une réussite totale.
L'opération britannique
Articles détaillés : Opération Freshman et Opération Grouse.
Le 19 octobre 1942, quatre parachutistes norvégiens formés par la Special
Operations Executive en Écosse rejoignent l'agent local afin de préparer
l'arrivée d'un commando britannique constitué de personnel du génie de la 1re
division aéroportée britannique.
Le 19 novembre, deux planeurs tentent un atterrissage dans la zone de l'usine.
Le premier qui a rompu son câble parvient à se poser en détresse. Les survivants
sont fusillés par les Allemands. Le second s'écrase avec son avion remorqueur
contre une montagne.
Les Allemands renforcent leur défense. Les quatre parachutistes norvégiens et
leur agent local se cachent tout l'hiver dans une hutte.
L'opération norvégienne
Article détaillé : Opération Gunnerside.
En février 1943, six autres parachutistes norvégiens sont largués dans la zone,
portant l'effectif du groupe à onze hommes. Le 27 février, neuf parachutistes
parviennent à s'infiltrer en escaladant la montagne et atteignent l'usine. Ils
réussissent à placer leurs charges et à détruire des parties vitales de l'usine.
L'opération aérienne
En novembre 1943, la production d'eau lourde, bien que fortement ralentie, a
repris. Les Alliés en sont informés et font bombarder l'usine par l'aviation. Le
résultat n'est guère probant ; la proximité des montagnes ne facilite pas
l'approche des bombardiers. Le raid des bombardiers fut un échec, en effet, de
nombreux morts civils furent à déplorer.
L'opération finale
En février 1944, les Allemands décident de transférer par mer le stock d'eau
lourde en Allemagne. Deux des parachutistes norvégiens restés sur place font
sauter le bateau avec son chargement, sur le lac Tinnsjå. Les recherches de
l'Allemagne pour concevoir la bombe atomique seront définitivement endiguées.
Agents SOE norvégiens impliqués
L'agent infiltré dans l'usine
Einar Skinnarland
L'équipe Grouse/Swallow
Jens Anton Poulsson
Arne Kjelstrup
Knut Haugland (Il fit partie du voyage du Kon Tiki - capitaine Thor Heyerdahl -
en 1947.)
Claus Helberg
L'équipe Gunnerside
Joachim Rønneberg
Knut Haukelid
Fredrik Kayser
Kasper Idland
Hans Storhaug
Birger Strømsheim
Leif Tronstad, planificateur au Royaume Uni
L'équipe du lac Tinnsjø
Knut Haukelid « Bonzo »
Rolf Sørlie, résistant local
Einar Skinnarland, opérateur radio
Gunnar Syverstad, assistant laboratoire de l'usine
Kjell Nielsen, ingénieur responsable du transport de l'usine
« Larsen », ingénieur usine sénior
Knut Lier-Hansen, qui procura une voiture et un chauffeur.