Commandos français d'Afrique
Le 15 août à minuit, les ombres du lieutenant-colonel Bouvet et de ses commandos français d'Afrique glissent dans la nuit. Après l'escalade de la falaise du Cap Nègre au Lavandou dans le Var, la première batterie d'artillerie est arrachée aux Allemands.
Le 1er Groupe de Commandos d'Afrique a été constitué le 26 juillet 1943
à partir d'un noyau du Corps Franc d'Afrique. C'est la Commandant BOUVET qui en fut le chef. Le recrutement se fit parmi les volontaires de tous âges et origines nationales ou confessionnelles. Parmi eux des jeunes koubéens d'une vingtaine d'années : Georges BONNET, Jean CREUSAT, Henri FABRE, Roger FONT, Georges GENER, Georges HILAIRE, Paul MARION,,Raphael MUNOZ, Vincent PASTOR, Jean RIBERT, Roger SALORD, René SASTRE et Pierre VELSCH
Les sept cents volontaires du Lieutenant - Colonel BOUVET avaient été durement entraînés en ITALIE à AGROPOLI , et leur chef , pour les avoir si souvent vus sur la " MOSAÏC " , un plan ( en caoutchouc mousse ) à grande échelle et à amplification des altitudes , qui reproduisait en relief le littoral Français entre le LAVANDOU et CANNES , " tous les détails du sol s'y trouvaient " , connaissaient jusqu' au moindre détail de la zone où ils allaient être engagés .

Un des objectifs primordiaux du Commandos d' AFRIQUE , était le Cap Nègre , dominant le rivage de sa centaine de mètres de haut . L' énorme masse du Cap Nègre , entre LE RAYOL - CANADEL et CAVALIERE est un obstacle naturel pratiquement infranchissable . C' était l' objectif à conquérir de nuit par le Commandos d' AFRIQUE du Lieutenant - Colonel BOUVET , et que surmontait une batterie dont les trois canons de 155mm de la Kriegsmarine , pouvaient compromettre sérieusement la réussite du débarquement sur le flanc Ouest de l' Opération " DRAGOON " .

Le samedi 12 Août , les hommes avaient embarqué pour PROPRIANO à bord de trois navires Canadiens , gardés au secret jusqu' au 14 Août avant d' appareiller pour les Côtes Varoises . Ils avaient alors été informés sur leurs objectifs :
- la destruction de la batterie de 155mm du Cap Nègre ,
- prendre le mont " BISCARE " ,
- l' occupation du village de LA MÔLE ,
- le contrôle de la Route Nationale 98 , entre BORMES - LES - MIMOSAS et COGOLIN .
- la maîtrise de la route du littoral ( Départementale 554 ) conduisant à CAVALAIRE où aurait lieu le débarquement de la 1ère Armée Française .
Juste avant la tombée de la nuit , à bord des bâtiments des Forces " STIKA " et " ROMEO " , dont les trois mille hommes se préparaient à opérer des ravages dans les défenses Allemandes des îles d' HYERES et de la côte , entre les baies du LAVANDOU et de CAVALAIRE . Il était un peu moins de 18 H , lorsque le central radio du cargo " PRINCE - DAVID " aux ordres du Capitaine T- D . KELLY de la Marine Canadienne - capta un " naval - message " codé , émis par le croiseur " AUGUSTA " , navire de commandement de Lyal DAVIDSON . Quelques instants après , quatre lignes dactylographiées en clair ( décodées ) , dansaient devant les yeux du Lieutenant - Colonel BOUVET qui demanda immédiatement au Capitaine KELLY la diffusion du message aux trois bâtiments des Commandos d' AFRIQUE ( PRINCESS - BEATRIX , PRINCE - DAVID , le PRINCE - ALBERT ) .
MESSAGE :
- " Le Contre - Amiral DAVIDSON , les Officiers et les équipages des Marines Alliées saluent le Colonel BOUVET et son Groupe de Commandos qui vont avoir l' honneur de mettre les premiers le pied sur le sol de leur Patrie pour la Libérer . Que DIEU vous protège et vous garde ... "
Le 15 Août 1944 : 00 H 30 ( du matin ) , heure H moins 07 H 30 .
- 1ère Mission du jour J :
L' enseigne de Vaisseau de la Marine Américaine , nommé JOHNSON et l' Officier Français des Commandos d' AFRIQUE , le Commandant Marcel RIGAUD , ces deux hommes s' apprêtaient à exécuter la première mission historique du jour J . Pour le Commandant RIGAUD , en effet , l' heure H devait sonner dans moins d' une demi - heure , le 15 Août , cinq minutes après minuit .
Le Commandant RIGAUD et l' enseigne de Vaisseau JOHNSON n' étaient armés , en tout et pour tout , que de leur " colt 45 " et de leur mitraillette " Thomson " . En fait , leur tâche n' était pas d' engager le combat , et d' une certaine façon , il leur faudrait tout faire pour l' éviter . Leur mission était simple : ils devaient accoster dans la petite baie du RAYOL , sur la droite en venant par la mer du redoutable Cap Nègre , sans éveiller l' attention des guetteurs Allemands . Ils devaient par une série de signaux lumineux , baliser ainsi la zone d' assaut pour les deux patrouilles d' avant - garde : les vingt hommes de L' Adjudant Noël TEXIER et du Sergent - Chef Georges DU BELLOCQ .
Puis une heure plus tard , ils devaient guider le débarquement principal , du Lieutenant - Colonel Georges Régis BOUVET et de ses six cents Commandos , chargés de couper les renforts Allemands sur la Route Départementale 554 allant du LAVANDOU à CAVALAIRE avant le lever du jour .
L' enseigne de Vaisseau JOHNSON et le Commandant RIGAUD étaient allongés au fond de leur " surf - boat " ( embarcation étroite et légère en caoutchouc équipée d' un moteur électrique de deux chevaux , conçue pour franchir le ressac ) lequel filait seul vers la plage du RAYOL . Ils scrutaient devant eux la ligne sombre de la terre se rapprochant rapidement . C' est alors que le Commandant RIGAUD se rendit compte qu' ils avaient été les victimes d' une épouvantable erreur de direction . La plage qui s' étendait devant eux n' était pas celle du RAYOL .
Après une demi - heure de navigation et 3 kilomètres de navigation vers l' Est , ils abordèrent enfin une petite crique en forme d' amphithéâtre : la plage du RAYOL .
Le Commandant RIGAUD , se demandait à mesure que les minutes passaient si les deux patrouilles d'avant - garde et derrière elles le gros de l' effectif , n' avaient pas été victimes de la même et " désastreuse " erreur de cap .
Le Commandant RIGAUD ne s' était pas trompé , en redoutant pour les convois successifs qu' il devait guider vers le rivage , la même erreur de navigation commise par les Marins Canadiens . Il ne pouvait pas se douter que de simples rochers à l' entrée de la plage , affleurant de la mer , allaient bouleverser de fond en comble , tous les plans minutieusement mis au point depuis un mois . Aucun des bateaux des Commandos ne devait accoster au bon endroit . Les embarcations allaient aborder la terre parfois avec d' importants intervalles de temps , de grossières erreurs d' estimation , et elles allaient se trouver régulièrement déportées à l' Ouest des endroits prévus pour leur débarquement .
Les deux patrouilles d' avant - garde , composées chacune de neuf hommes et d' un sous - officier ( Adjudant - Chef -TEXIER et le Sergent - Chef DU BELLOCQ ) puis l' essentiel du 1er Commando , sous les ordres du Capitaine DUCOURNAU ( 70 hommes répartis sur 2 bateaux ) , victimes eux aussi de la même erreur de navigation , se retrouvèrent ( pour le premier bateau seulement , après correction de son cap ) , finalement au pied de leur objectif : le Cap - Nègre .
Pendant que l' Adjudant - Chef Noël TEXIER , et ses hommes , escaladaient la paroi rocheuse par sa face Est , chacun de ses pas le rapprochant de la mort qui le guettait sur le chemin de ronde , la seconde patrouille , conduite par le Sergent - Chef DU BELLOCQ , parvenait non sans peine à la route .
Le Capitaine DUCOURNAU parvenait au pied de la falaise , dont la masse obscure n' était pas sans évoquer celle d' un château fort du Moyen - Age . Parti avec soixante - dix hommes , il avait en cours de route , perdu le contact avec près de la moitié d' entre eux ( lors de la correction de leur cap , un seul des deux bateaux fit la correction , celui du Capitaine DUCOURNAU ) . La mort de TEXIER causée par une volée de grenades provenant du chemin de ronde , puis le silence dans lequel les assaillants s' étaient tenus , avaient semé la confusion au sein de la garnison Allemande qui s' était portée en masse à l' Est du Cap - Nègre .
Les hommes du Capitaine Paul DUCOURNAU , signèrent la première victoire du débarquement . Ayant réussi à s' approcher silencieusement de la batterie , ils déclenchèrent vers 01 H 00 ( du matin ) l' assaut final qui allait réduire la garnison Allemande .
Il y eu une vingtaine de morts en son sein , deux blessés chez les hommes du Capitaine DUCOURNAU .
Ceux - ci n' avaient cependant pas détruit les fameux trois canons de 155mm de la Kriegsmarine mais des pièces de campagne de 77mm qui les remplaçaient car , quelques jours auparavant , les bombardements aériens Américains les avaient démantelés ...
A la gare du Canadel , Madame SILVAN , qui faisait office de Chef de gare , s' efforçait de rassurer sa fille Paulette . Avec les deux femmes , il y avait le conducteur de train , Antoine PERGOLA et son fils Ange .
Se coulant dans la nuit , le Lieutenant BLONDEAU et ses hommes n' étaient plus qu' à quelques mètres . S' approchant d' une fenêtre qu' illuminaient les sinistres rougeoiements du bombardement , Madame SILVAN avait entrevu des ombres . Très loin de soupçonner la vérité , elle était sûre qu' il s' agissait d' une patrouille Allemande . Et quand , au même moment , une voix avait crié " ouvrez ! " , elle n' avait pu s' empêcher de se dire : " Tiens , ils se mettent maintenant à parler en Français ! " .
Antoine PERGOLA avait ouvert la porte que les coups de crosse menaçaient de faire éclater . Deux hommes , un grand , l' autre petit , " à la peau plus noire que blanche " , avaient fait irruption , mitraillette en avant . Abasourdi , n' en croyant pas ses oreilles , il avait endendu l' un deux dire : " On est l' Armée d' AFRIQUE , on débarque ... " Et l' autre avait ajouté : " nous devons absolument gagner LA MÔLE . Il faut que vous nous montriez la route ..."
Remis sur le bon chemin , le troisième Commando , après un accrochage près du cimetière , avait franchi sans trop de mal les 12 Kilomètres les séparant du noeud routier , dont il devait s' assurer le contrôle jusqu' à l' arrivée des premiers éléments Américains ...
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