Yvonne Abbas
Combattant
volontaire de la Résistance
Yvonne Abbas est une résistante française, née le 29 avril 1922 à Pérenchies.
Elle fut déportée dans le camp de femmes de Ravensbrück.
Biographie
Jeunesse et formation
Yvonne Abbas est née le 29 avril 1922 à Pérenchies (Nord). Elle fait sa
scolarité à La Madeleine (Nord) jusqu'au certificat d'études. Issue d'une
famille modeste, orpheline, elle commence à travailler à l'âge de 13 ans et
devient, très jeune, syndicaliste. Elle est élevée comme dans une famille «
éprouvée par la première guerre », « dans la haine de l'Allemand », se dit
patriote, antifasciste. Elle se marie très jeune et fréquente des associations
de jeunes filles et notamment l’Union des jeunes filles de France dès sa
fondation, en 1936, où elle connaît Marie-Claude Vaillant-Couturier et Danielle
Casanova.
Résistance
Elle s’engage dans la Résistance et, dès le début de l'occupation, son logement
sert d'hébergement et de dépôt de matériel pour la Résistance qui s'organise. On
parle de presse clandestine, de tracts, de faux-papiers, de guerre idéologique
contre l'occupant.
« On a même imprimé des tracts sur des papiers de boucher », se rappelle-t-elle.
L'objectif : recruter, ventiler. Elle est agent de liaison et fournit Cambrai,
Douai... Que cela soit en bicyclette, en train, la même peur l'assaille toujours
mais le courage l'a fait avancer. « Nous avons été plus forts que la peur »,
dit-elle sans oublier tous ses camarades résistants.
Arrestation et emprisonnements
Cette activité résistante lui vaut d'être arrêtée par la « Police Spéciale »
française le 29 avril 1942 - le matin de ses 20 ans - avec Louis Petit et Jean
Bracq (qui seront fusillés par les nazis). Elle est emmenée au commissariat
central de Lille, subit des interrogatoires musclés, de la torture morale mais
ne donne pas de noms.
Elle part à la cour spéciale de Douai, se défend seule, estimant que tous les
avocats sont des collabos et est condamné à huis clos, comme « bandit ». Elle
est incarcérée à la prison de Cuincy, emprisonnée dans une cellule de 8 m2, avec
trois ou quatre autres détenus et dort sur le paillasson. Un lave-main et une
ampoule mais pas d'eau ou d'électricité.
Elle est ensuite transférée à la prison de la Petite Roquette, à Paris.
De la prison de la Petite Roquette, Yvonne Abbas est ensuite transférée à la
Centrale de Rennes, avant d'être confiée à la Gestapo, puis envoyée à
Romainville. Agrippée aux barreaux de sa casemate, elle voit passer les derniers
pelotons de fusillés. Ses camarades avec lesquels elle chante une dernière
Marseillaise.
Déportation
De là, elle est déportée en train au camp de concentration de Ravensbrück, le
plus grand camp de femmes.
Le convoi ferroviaire durera 5 jours et 4 nuits dans des conditions
épouvantables avant d'arriver dans ce camp pour femmes dont 92 000 déportées ne
sont jamais revenues. « Ravensbrück était surnommé l'enfer des femmes, comme
dans les autres camps tout y était fait pour déshumaniser l'être humain. »
À son arrivée, elle voit des blocs, des femmes squelettiques en tenue de
bagnard, marche sur les cendres retombées des fours crématoires aux alentours.
Elle devient le matricule no 35138, travaille douze heures par jour. Elle vit
sans hygiène, dans la même tenue. «C'est l'humiliation la plus complète»,
résume-t-elle. Mais toujours, elle résiste. Elle est déplacée dans le camp de
travail d'Holleischen, en Tchécoslovaquie.
Fin avril 1945, les nombreux bombardements apparaissent comme un espoir au bout
de 37 mois de captivité. « C'était très long, chaque jour, on s'attendait à
quelque chose », se rappelle « Vony », son surnom dans le camp.
Finalement, Ravenbrück est libéré le 30 avril 1945 par l’Armée rouge ;
cependant, elle ne revient en France que le 25 juin 1945.
Le 5 mai 1945, les alliés arrivent. C'est la fin du calvaire pour Yvonne Abbas
qui revient en France, « reprend la vie » malgré son veuvage.
En effet, son mari, Florent Debels, est arrêté le 2 mai 1942, à Sin-le-Noble
(Nord) chez Charles Loubry (jeune résistant de dix-sept ans) à la suite d’une «
fuite » d’un résistant gravement blessé, puis torturé et fusillé. De la prison
de Cuincy, il est envoyé à la prison de Louvain (Belgique) où le tribunal
militaire allemand le condamne à mort le 5 juin 1942 pour « détention d’armes à
feu et propagande illégale communiste ». Il est fusillé au crépuscule du 1er
juillet 1942 au fort du Vert-Galant, à Wambrechies (Nord) avec Louis Petit et
Jean Bracq.
Engagement
Inlassablement, cette Résistante de la première heure et rescapée du camp de
Ravensbrück témoigne notamment dans les établissements scolaires.
Sa volonté de raconter l'enfer de Ravensbrück est d'autant plus grande qu'elle
en a longtemps été empêchée. « À la Libération, personne ne voulait parler, se
souvient-elle. Il y avait une honte de la souffrance, le traumatisme était trop
grand. On a dû laisser passer une génération avant de pouvoir raconter. Avant,
c'était trop tôt, on ne nous croyait pas toujours ». Lorsqu'elle se rend dans
les établissements scolaires, Yvonne Abbas n'oublie jamais d'apporter une robe
de bagnard, identique à l'unique vêtement qu'elle a porté pendant sa détention.
« On est souvent surpris de voir ce que les enfants savent mais il est
primordial de témoigner encore et toujours. Les livres d'histoire n'en disent
pas assez et les profs n'ont pas toujours le temps. Avec nos témoignages, on
raconte des choses qu'ils n'imaginent même pas».
Yvonne Abbas s'implique également dans le Concours national de la résistance et
de la déportation à destination des collégiens. « Je fais le choix de parler
pour tous ceux qui ne sont pas revenus. Voilà pourquoi je ne pense pas que l'on
puisse dire que je suis bénévole, c'est un devoir de mémoire. » « Mais on le
fait sans stigmatiser les Allemands. Les nouvelles générations n'ont pas à payer
pour les crimes passés ».
Aujourd'hui, elle pense toujours à ses anciens camarades disparus mais ne
regrette jamais son engagement dans la Résistance : « Ce que l'on peut
regretter, c'est de ne pas en avoir fait assez ».
Distinctions
Officier de la Légion d'honneur
Médaille militaire
Combattant volontaire de la Résistance
Ancien combattant
Chevalier dans l'ordre des Palmes académiques
Présidente de la Section ANACR Lille - La Madeleine,
Présidente de l’Association du musée de la Résistance en Zone Interdite de
Denain,
Membre du bureau national de l’Amicale de Ravensbrück,
Membre du comité national de la FNDIRP.
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