Opérations SAS en Bretagne
Les opérations SAS en Bretagne furent des opérations menées par des SAS français
en Bretagne à partir de la nuit du 5 au 6 juin 1944, en soutien au débarquement
de Normandie pendant la Seconde Guerre mondiale. Le but de ces commandos était
d'empêcher les troupes allemandes présentes en Bretagne de rejoindre le nouveau
front ouvert en Normandie. Ce furent les premières troupes alliées engagées sur
le territoire français dans le cadre de l'opération Overlord. Ces opérations se
terminèrent lorsque l'avance alliée permit de libérer la majeure partie du
territoire breton, en août 1944, à l'exception des ports de Brest, de Lorient et
de Saint-Nazaire.
Description des opérations
Contexte
En janvier 1942 en Égypte, le major britannique Stirling, fondateur et chef des
SAS, intègre à son unité, le L detachment of the SAS Brigade, les parachutistes
de la France libre de la 1re Compagnie d'Infanterie de l'Air du capitaine Bergé.
Ces hommes sont alors chargés d'effectuer des missions de sabotage et de
harceler les forces de l'Axe en Crête, en Libye et en Tunisie. De retour en
Grande-Bretagne en avril 1943, deux bataillons voient finalement le jour en
novembre : le 3e Bataillon d'Infanterie de l'Air (BIA) sous le commandement du
capitaine Pierre Chateau-Jobert, surnommé Conan , et le 4e BIA dirigé par le
commandant Pierre-Louis Bourgoin surnommé « le manchot ». Finalement, ces deux
unités de parachutistes français sont intégrées au sein de la brigade SAS placée
sous le commandement du général Roddy McLeod (remplaçant de Stirling, capturé)
sous les dénominations de 3rd SAS et 4th SAS.
Buts et moyens
Lorsque la Normandie est choisie comme lieu de débarquement, il est vital pour
la réussite de l'opération que les Allemands ne renforcent pas rapidement le
front. L'opération Fortitude a pour but de faire croire aux Allemands que le
débarquement en Normandie n'est qu'une diversion, et qu'un second débarquement
est prévu dans le Pas de Calais, afin que les troupes allemandes stationnées
dans le Nord de la France et en Haute-Normandie y restent. Pour prévenir le
risque que les troupes allemandes stationnées en Bretagne (principalement
surtout des supplétifs ukrainiens ou russes) ne rejoignent rapidement le front
normand, les Alliés décident que la nuit précédant le débarquement, une partie
des SAS français seront larguées en Bretagne afin d'y mener des opérations de
sabotage et de guérilla.
Les SAS français, s'appuyant sur la Résistance locale, doivent mener une
guérilla contre les troupes allemandes, et des opérations de sabotage des voies
et des moyens de communication. Les 85 000 soldats allemands et troupes
supplétives, soit huit divisions, doivent être bloqués en Bretagne pendant toute
la bataille de Normandie.
Pour cela, à J-1, quatre sticks SAS, respectivement aux ordres des lieutenants
Marienne, Déplante, Botella et Deschamps, embarquent dans deux quadrimoteurs
Short Stirling de la RAF à destination de la Bretagne. Ils sont largués deux à
deux dans le sud et le nord de la péninsule bretonne afin de préparer le terrain
pour d'autres parachutages qui suivront les jours suivants.
Les deux premières équipes sont donc parachutées le 6 juin à 0 H 30 dans le
Morbihan près de Plumelec à 15 km du maquis de Saint-Marcel, pour établir une
base et armer les résistants locaux ; les deux autres sont « droppés » en forêt
de Duault dans les Côtes-d'Armor. Leur mission est d'établir des bases de
guérilla dont les noms de code sont respectivement Dingson et Samwest.
Les opérations
Opération Samwest
Zone d'opérations du 4th SAS en Bretagne
Sous le commandement des lieutenants Deschamps et André Botella, 18 commandos
français du 4th SAS français furent parachutés près de la forêt de Duault dans
les Côtes-du-Nord, à une trentaine de kilomètres de Guingamp. La première phase
de la mission consistait à établir une base sûre dans la péninsule bretonne, nom
de code Samwest, près de Saint-Brieuc, et d'entrer en contact avec la Résistance
locale, puis établir des zones de parachutage et d'atterrissage pour le
bataillon. Jusqu'au 11 juin, 114 SAS français furent parachutés sur Samwest. En
se rendant compte du potentiel de la Résistance locale, il fut décidé de
l'intégrer aux opérations de guérilla contre les troupes allemandes.
Le 12 juin, l'armée allemande passe à l'assaut du rassemblement, mais obtint
seulement la dispersion des SAS et résistants formés. Une partie des dispersés
rejoignit Dingson.
Opération Dingson
Un premier groupe de 18 commandos (sticks des lieutenants Marienne et Déplante)
avait été parachuté près de Plumelec, dans le Morbihan, non loin de Vannes. Leur
but était d'établir la base Dingson où seront parachutés ensuite d'autres SAS.
Immédiatement après leur parachutage, ils durent combattre des troupes
supplétives allemandes (des Ukrainiens et Géorgiens de l'armée Vlassov). Une
heure plus tard, le caporal Émile Bouétard, un Breton, la première victime du
début de l'opération Overlord2, fut blessé près de Plumelec, puis achevé (dès
1942, Hitler avait demandé que les commandos SAS faits prisonniers soient
exécutés2). Marienne avait également perdu dans l'opération ses radios. Jusqu'au
18 juin, 160 soldats français du 4th SAS (dont son commandant, Bourgoin, auquel
les Anglais offrirent un parachute tricolore) furent parachutés sur la base
Dingson installée au maquis de Saint-Marcel,.
Un grand stock de matériel fut aussi parachuté chaque nuit sur la zone de
largage (DZ ou drop zone) « Baleine » (située comme le P.C. à la ferme de la
Nouette, sur la commune de Sérent), y compris, peu avant l'attaque allemande,
quatre jeeps et des mitrailleuses. Mais les jeeps atterrirent en partie dans les
arbres, et les mitrailleuses furent endommagées : la puissance de feu de
l'escadron motorisé s'en trouva amoindrie. Une partie des survivants de Samwest
avait alors rejoint la base Dingson ainsi que quelques cooneys parties venus se
réarmer. La défense allemande locale attaqua le maquis le 18 juin. Les pertes,
côté français furent d'une trentaine de victimes, les Allemands achevant les
blessés. Après la bataille, les troupes allemandes, aidés de collaborateurs
français, traquèrent les survivants, SAS et maquisards.
Opération Cooney parties
58 parachutistes répartis dans 18 sticks de 3 à 5 hommes furent parachutés dans
la nuit du 7 au 8 juin dans le cadre de l'opération Cooney Parties. Largués en
différents endroits de la Bretagne et sans comité d'accueil, ils étaient
essentiellement chargés du sabotage du réseau ferré breton, ainsi que du réseau
électrique et de celui de communication, en parallèle des opérations Samwest et
Dingson. Ces 18 sticks, leur mission remplie, devaient rejoindre, quelques jours
plus tard, les bases Dingson ou Samwest, pour se réarmer, encadrer des
maquisards ou participer à d'autres missions de sabotage. À la suite du
démantèlement de Samwest le 12 juin, des équipes rejoignirent Dingson, d'autres
restèrent sur place, prenant contact avec la population civile, encadrant des
résistants en plus petit nombre et continuant leurs actions de sabotage.
Opération Lost
L’opération Lost fut le parachutage de sept SAS dans la nuit du 22 au 23 juin
au-dessus de la Bretagne, à la suite de la dispersion de la base Dingson (Saint-Marcel).
Le major britannique Carry Elwes fut chargé de reprendre contact avec le
commandant Bourgoin, afin d'informer le commandement allié, sans nouvelles
depuis la bataille de Saint-Marcel. Cette mission impliquait également le retour
en Grande-Bretagne d'un officier français chargé de rendre compte. L'équipe
radio, dirigée par le sergent Marty, fut chargée de rejoindre le capitaine
Marienne, afin de remplacer son équipe disparue. Le lieutenant Fleuriot et son
stick furent chargés de veiller à la sécurité du groupe.
Opération Grog
Cette opération débuta le 13 juin à la suite de la dispersion de la base Samwest.
Le capitaine Déplante quitte le secteur de Saint-Marcel et est chargé de monter
la base "Grog" dans les environs de Pontivy. Cette base doit assurer le recueil
des éléments dispersés provenant de "Samwest" aux ordres du Capitaine Leblond
qui n'ont pu rejoindre Saint-Marcel, et assurer la formation et l'armement des
bataillons FFI du secteur.
Opération Derry
Cette opération, complètement indépendante des précédentes, fut conduite par la
2e compagnie du 3rd bataillon SAS du commandant Chateau-Jobert, du 5 au 18 août
1944. Elle avait pour but de préparer la libération du Finistère, en prévision
de l'avance alliée. Ce squadron, aux ordres du capitaine Sicaud, et réparti en 5
sticks, fut parachuté dans la nuit du 4 au 5 août. Sur les 82 hommes engagés, 4
furent tués et 3 furent blessés.
Réactions des Allemands
Outre les tentatives d'encerclement des bases Samwest et Dingson, les Allemands
traquèrent les résistants et les parachutistes. Le 12 juillet notamment, aidés
par un groupe de collaborateurs affiliés à la Gestapo, les Allemands découvrent
et surprennent le PC de Pierre Marienne à Kerihuel, un hameau de Plumelec. Le
capitaine Marienne et 17 de ses hommes (6 parachutistes, 8 résistants et 3
fermiers locaux) furent exécutés à l'aube, de façon sommaire. Ils multiplièrent
les représailles contre les prisonniers, mais aussi contre la population locale
accusée de soutenir les commandos et la Résistance.
Fin des opérations
Plan de la progression alliée en Bretagne - 1er au 12 août 1944
En août 1944, les Américains réussirent avec la percée d'Avranches à pénétrer en
Bretagne. L'insurrection générale fut déclenchée par la Résistance, et la
Bretagne rapidement libérée, à l'exception des ports forteresses : Brest,
Lorient et Saint-Nazaire. Sur les 450 SAS engagés du 4e bataillon SAS, 70 ont
été tués et 197 blessés. Les FFI qui y avait pris part, encadrés par les SAS,
avaient aussi subi de sérieuses pertes : 116 morts dont 30 dans le maquis de
Saint-Marcel. Une partie de ces forces forma, dès 1944, le 41e RI dont le
drapeau porte l’inscription « Saint Marcel 1944 ». Les SAS, du 3rd comme du 4th,
rejoignirent Vannes, où ils se regroupèrent. Ceux du 3rd retournèrent en
Angleterre par la Normandie, en prévision d'un 2nd parachutage en France. Le 4th
SAS (ou 4e bataillon de l'infanterie de l'air (BIA)) devenu le 2e régiment de
chasseurs parachutistes en avril 1944, et fut envoyé sur un autre théâtre
d'opérations, la Loire : ce fut l'opération Spencer qui put débuter fin août
après la réception le 5 août à Locoal-Mendon, de 10 planeurs Waco contenant
chacun une jeep et 3 SAS, ce qui augmentait considérablement la mobilité et la
puissance de feu des parachutistes. Le 3rd SAS (3e BIA) changera également de
nom, et deviendra le 3e régiment de chasseurs parachutistes.
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