Opération Ariel
L'opération Ariel (parfois appelée opération Aerial - Antenne) est le nom donné
à l'évacuation, durant la Seconde Guerre mondiale, des forces alliées depuis les
ports de l'ouest de la France, du 15 au 25 juin 1940, suite à l'effondrement
militaire conséquence de la bataille de France contre l'Allemagne nazie. Elle a
suivi deux autres évacuations : l'opération Dynamo, l'évacuation de Dunkerque et
l'opération Cycle, l'évacuation du Havre qui s'est terminée le 13 juin.
Contexte
Alors que l'opération Dynamo à Dunkerque avait permis d'évacuer une grande
partie des forces combattantes du Corps expéditionnaire britannique (British
Expeditionary Force - BEF), certaines unités de combat de la 1re division
blindée et de la division Beauman et plus de 150 000 hommes de soutien étaient
isolés du reste des forces au sud par les Allemands dans leur course vers la
mer. En outre, la 52e division d'infanterie (Lowland) et la 1re division
canadienne avaient été jetées dans la précipitation en France pour renforcer la
défense de l'ouest du pays. Toutes ces forces furent appelées « Second BEF ». Le
général Sir Alan Brooke était revenu d'Angleterre pour les commander1. À son
arrivée le 13 juin, il s'est vite rendu compte qu'il n'avait aucune chance de
succès et que le plan français de retraiter et de prendre position en Bretagne
n'était pas réaliste. En conséquence, dans un appel téléphonique dans la soirée
du 14 juin, il réussit à persuader le Premier ministre britannique, Winston
Churchill, que toutes les troupes britanniques en France devait être désengagées
et évacuées.
Evacuation de troupes à bord du SS Guinean lors de l'opération Ariel
Évacuation depuis Cherbourg et Saint-Malo
L'évacuation de la 52e division de Cherbourg a été placée sous le commandement
de l'amiral William Milbourne James, commandant en chef, Portsmouth. Il a dirigé
les plus grands détachements de troupes et de navires opérant depuis
Southampton. Les petits navires côtiers partaient depuis Poole et les schuyts
néerlandais depuis Weymouth. La plupart de la 52e (Lowland) et la 1re division
blindée embarquèrent entre le 15 et le 17 juin. La division Beauman et la force
Norman, qui étaient des formations composites, embarquèrent dans la soirée du 17
juin. Les premières troupes allemandes entrèrent dans la périphérie de la ville
lorsque le dernier navire prit le large. 30 360 hommes ont été évacués et
emmenés à Portsmouth. À Saint-Malo, 21 474 hommes, principalement de la 1re
division canadienne, ont embarqué le 17 et 18 juin.
Évacuation depuis Brest, Saint-Nazaire et La Pallice
L'évacuation des ports les plus à l'ouest a été commandée par l'amiral Sir
Martin Eric Nasmith, le commandant en chef du commandement des atterrages
occidentaux basé à Devonport. L'évacuation de Brest a été réalisée par une
grosse flotte de navires comprenant les transports de troupes Arandora Star,
Otranto, et Strathaird. 28 145 Britanniques et 4 439 soldats alliés,
principalement des équipes au sol de la Royal Air Force, ont été emmenés le 16
et 17 juin, sans aucune intervention importante de la Luftwaffe, et ont été
débarqués à Plymouth. Un grand nombre d'unités de soutien et de la logistique de
l'armée britannique, des personnels de la RAF, des Belges, des Tchèques et les
troupes polonaises ainsi que des civils britanniques attendaient à
Saint-Nazaire. La flotte envoyée pour l'évacuation comprenait les grands
transports de troupes Georgic, Duchess of York, Franconia, Lancastria et l'Oronsay.
Le Franconia a été endommagé par des bombes en route et retourna à Plymouth. La
plupart des gros navires avaient dû jeter l'ancre dans la baie de Quiberon car
la navigation dans le chenal étroit jusqu'à l'estuaire de la Loire à
Saint-Nazaire est difficile. Jusqu'au 17 juin, les troupes ont été transbordées
à partir de Saint-Nazaire jusqu'aux grands transports de troupes par des
destroyers et des bateaux côtiers. Les transports de troupes avaient pour ordre
d'embarquer autant de personnel que possible et furent rapidement surpeuplés. À
14 heures, il y eut un raid aérien de bombardiers allemands et l'Oronsay a été
touché par une bombe sur la passerelle. Dans un second raid à 15:45, le
Lancastria a été touché par quatre bombes qui ont pénétré la cale remplie de
troupes et provoqué la rupture des réservoirs de mazout. En 20 minutes, le
navire a gîté et a coulé, bien que 2 447 personnes à bord aient été sauvées, il
y eut environ 4 000 tués (les estimations varient de moins de 3 000 à 5 800), la
plus grande perte dans l'histoire maritime britannique7. Les dernières troupes
britanniques quittèrent la France dans la matinée du 18 juin en deux convois de
petits navires marchands et se dirigèrent vers Plymouth. En raison de
renseignements erronés qui suggéraient que les Allemands étaient plus proches
qu'ils n'étaient en réalité, beaucoup d'équipements précieux ont été abandonnés.
Le 19 juin, une dernière mission est arrivée à Saint-Nazaire pour évacuer 8 000
soldats polonais qui avaient été signalés au port, en fait, il n'y en avait que
2 000. Plus au sud, à La Pallice (le port de commerce de La Rochelle),
l'officier principal de la marine britannique découvrit qu’aucun navire n'avait
été envoyé pour les troupes britanniques et polonaises en attente au port. Il a
donc réquisitionné un certain nombre de navires de commerce français et les fit
embarquer le 18 juin. Par la suite, deux flottilles de navires britanniques sont
arrivées pour prendre des retardataires polonais. Au total, 10 000 Britanniques
et plus de 4 000 Polonais ont été sauvés de La Pallice.
Évacuation depuis Bordeaux, Le Verdon, Bayonne et Saint-Jean-de-Luz
Le 17 juin, l'évacuation commença depuis Bordeaux grâce aux croiseurs et aux
destroyers de la Royal Navy et par les navires marchands alliés qui étaient
encore dans le port. Le personnel diplomatique britannique et le président de la
Pologne Wladyslaw Raczkiewicz et son cabinet eurent la priorité. Le reste a été
principalement des troupes polonaises et tchèques. L'évacuation continua dans
les ports du Verdon et de Bayonne, situés à proximité, assistée par les
transports de troupes Batory, Sobieski, Chorzów, Lechistan (tous quatre battant
pavillon polonais), Ettrick et Arandora Star. Ces navires se sont par la suite
rendus à Saint-Jean-de-Luz, où l'évacuation s'est terminée le 25 juin à 14
heures, juste après le délai fixé par les conditions de l'armistice. Le dernier
jour de l'opération, le destroyer canadien HMCS Fraser a été éperonné et coulé
par le croiseur anti-aérien HMS Calcutta dans l'estuaire de la Gironde9. De
petites évacuations ont continué depuis la côte méditerranéenne française
jusqu'au 14 août 1940.
Bilan
Le nombre de personnes évacuées de France en Angleterre durant l'opération Ariel
se décompose comme suit :
Britanniques : 144 171
Polonais : 24 352
Français : 18 246
Tchèques : 4 938
Belges : 163
Au total, 191 870 soldats alliés, aviateurs et civils. Bien que la plupart de
l'équipement ait été perdu, 310 pièces d'artillerie, 2 292 véhicules, 1 800
tonnes d'approvisionnements et quelques chars ont été sauvés.