La  fin   du commando 

                                    VANDENBERGHE ..

                         -----------------------------

                -------------------------------------------

 

                                                                   

                                         PHOTO

                               

                                                                 

                                                           Pour rester dans le domaine de l’émotion forte et de l’inquiétude, cette histoire, survenue à Nam-Dinh au tout début  de  janvier 1952 ( Le 5 ou le 6 ai-je noté …) – Histoire qu’un civil ordinaire peut difficilement comprendre .

 

                                                           J’ai déjà dit plus avant dans ce récit de ma vie Vietnamienne, que les militaires de la 3ème C.V.N.T. , tous issus du volontariat , servaient dans l’armée régulière du Vietnam . Nous savions donc tout de ces jeunes gens : -famille -antécédents – relations, et entre 1951-1953 une désertion avec violence eut entrainé , pour la famille d’un des violents , les représailles que vous pouvez imaginer . Par contre , certaines formations militaires annamites , n’étaient alors constituées que de supplétifs ,rassemblés en commando, parfois anciens troupiers du viet-minh, ou repris de justice souvent sans identité , aventuriers bien payés , autorisés à rançonner en zone viet , et qui avaient pour mission de porter l’ incertitude et la peur , par tous les moyens possibles en territoire viet. Ils y parvenaient bien et souvent assez loin de nos postes avancés de la zone sud du Tonkin. Habillés comme les viets, imitant facilement les maquisards vietcong , ils se mêlaient facilement à eux .

                                                           Un de ces commandos, certainement le plus célèbre d’Indochine, fut celui de l’Adjudant Vandenberghe  , le Commando 24  je crois, dont le cantonnement , assez  proche du notre, deux kilomètres au plus ,à vol d’oiseau, était situé dans une ancienne résidence de bonnes sœurs, ou de moines .  

                                                           Européen de moins de trente ans, grand, très sportif, super sympa, pas bêcheur du tout, Vanden avait plus de cent hommes avec lui , tous asiatiques .

                                                           Les prouesses de ce commando étaient célèbres, il lui arrivait de se rendre très loin en zone viet porter l’insécurité avec des hommes pour la plupart anciens viets ralliés.

    

 

 

 

 

                                                           Nous le connaissions bien, car, aussi bien lui que nous, prenions nos repas de midi, assez régulièrement dans un restaurant Annamite situé près de l’ancienne banque de Nam-Dinh , siège de l’EM zone sud du Tonkin , lorsque nous n’étions pas de sortie . La patronne, grande et très belle jeune femme asiatique, faisait une cuisine de qualité, et,  en dehors de ses activités culinaires elle était la petite amie de Vanden.

 

                                                           Si Vanden parlait peu de lui, il arrivait cependant que notre groupe évoque avec lui, les petits à cotés de ses missions, car, si elles étaient tenues secrètes, le fait que ses sorties correspondent à l’arrivée de sa clientèle sur notre réseau radio, la lecture de ses comptes- rendus

leur décodage parfois, nous amenaient à savoir beaucoup de son activité, mais, bien entendu, nous ne devions en parler à qui que ce soit.     Et, nous nous en gardions bien.

 

                                                           Alors , que depuis quelques temps , les services de la sécurité militaire , alertés semble-t-il , nous incitaient à redoubler de prudence , vers minuit , ce 5 ou 6 Janvier 1952 , nous comprîmes rapidement que quelque chose de grave se passait chez notre voisin : évènements importants nous sembla-t-il – Plus aucune liaison , ni filaire , ni radio , et ce n’est que vers quatre heures du matin , alors que ça tirait tant et plus , depuis des heures , que nous apprenions que Vandenberghe et sa copine avaient été assassinés , que ses hommes mutinés s’étaient entre-tués et que ceux qui n’étaient pas morts avaient déserté ….

 

                                                           Emotion énorme chez nous tous,                  …incertitude…conciliabules entre Européens – Il faut renforcer la prudence d’autant qu’une certaine agitation, tant au dehors que dans notre cantonnement commençait à se faire sentir. – Et si nos hommes faisaient de même, et si, et si, allez donc savoir ? – Cette situation devenait avec rapidité une des émotions fortes de mes souvenirs …

                                                           Souvent, et c’était tout à fait normal, nous avions, en collaboration avec les cadres vietnamiens étudié le scenario d’une désertion en masse et arrêté les différentes solutions possibles, mais jamais nous n’aurions osé envisager une situation aussi pourrie que celle de cette fin de nuit chez notre voisin. -- De là à penser que le sort de Vanden allait nous être réservé….( Nous nous sommes avoué y avoir tous pensé à ce moment là ! )

 

                 

 

 

 

                                                           --Au fond de la cour, derrière les camions, deux ou trois de nos trouffions avaient tendance à s’agiter et à raconter des trucs à leurs copains….Mais que pouvaient-ils leur dire ? – La peur peut-être !              C’est foutu pensèrent nombreux d’entre nous, européens et asiatiques !! (Nous le sûmes par la suite, lors de conversations que nous eûmes après ce dramatique incident) – Soudain , sortant de son trou, nous occupions alors des positions de combat suivant un plan méthodiquement étudié, l’Adjudant de compagnie ,le célèbre adjudant GIANG, un tout petit, très petit homme , pistolet à la main , s’approcha de ces quelques gogos et, leur intimant de cesser leurs jérémiades, il leur fit rejoindre leurs postes de combat .

                                                           Craignant le pire, un copain me dit :   « viens avec moi, Maurice, on sera deux, c’est mieux ! … », Mais de suite, la tension tomba et nous pûmes rapidement lire un net soulagement sur plein de visages crispés jusqu’alors. (Les trois énergumènes peureux ou consentants partirent rapidement pour Hanoï … plus aucune nouvelle d’eux ensuite. )

Il fut peu souvent question de cet ‘incident’ même à l’intérieur de l’unité, comme si chacun, gêné, avait voulu oublier sa peur .Nos trouffions reçurent l’ordre de ne parler de rien, la 3èmè RM  vietnamienne resta muette elle aussi.

Rien ne fut écrit…Et en fait, il ne s’était rien passé, mais ça reste tout de même une des nuits les plus angoissantes de ma période annamite. De toute façon, cette anecdote fut très largement occultée par la tristesse et l’émotion occasionnées par l’épouvantable nouvelle de la mort de notre ami Vandenberghe

                                                           Merci encore à notre cher adjudant  GIANG  qui eut l’audace de réagir aussi vite et bien—Mais, bon dieu, que cette nuit  fut longue et angoissante ! ! ! !

                                                           Les réactions à ces situations  d’exception

ne se produisent que bien longtemps après l’évènement, elles ont l’avantage incontestable de renforcer la cohésion du groupe.

 

                                                           Après ce mémorable incident, difficile à raconter, il fut décidé qu’un de nous resterait éveillé la nuit, P.M  à proximité, et nous adoptâmes un second chien, qui, curieusement, devint aussi gentil que Boum, et les veilles de nuit furent très rapidement abandonnées.

 

                               -----------------------------------------------------

 

      Les histoires d’ASTERIX sont sans aucun doute plus marrantes, mais, chaque fois que je suis allé en Bretagne, Il a plu et j’y suis, chaque fois, resté trop peu de temps pour le rencontrer ! !

 

Maurice POTIER

 

L'adjudant-chef Vandenberghe, commandant le commando nord viêtnam n° 24 (commando "Vandenberghe" ou "des tigres noires") passe en revue ses hommes revêtus de la tenue noires des commandos nord-viêtnam, dite "Cu Nao" (du nom d'un tubercule, le Cu Nâu, que les paysans du delta tonkinois utilisent pour teindre des étoffes) et de casques en latanier, afin de s'infiltrer en zone viêt-minh. A gauche, le sergent-chef Tran Dinh Vy, adjoint de l'adjudant-chef Vandenberghe.

 

RETOUR index Indochine