Première bataille de la Marne et Seconde bataille de la Marne
La première bataille de la Marne, souvent identifiée comme « la bataille de la
Marne » a eu lieu du 5 septembre 1914 au 12 septembre 1914 entre d'une part
l'armée allemande et d'autre part l'armée française et le corps expéditionnaire
britannique. Cette bataille doit être distinguée de la seconde bataille de la
Marne, qui se déroula en juillet 1918.
Les combats se déroulèrent le long d'un arc-de-cercle de 225 km à travers la
Brie, la Champagne et l'Argonne, limités à l'ouest par le camp retranché de
Paris et à l'est par la place fortifiée de Verdun. Ce champ de bataille est
subdivisé en plusieurs batailles plus restreintes : à l'ouest les batailles de
l'Ourcq et des deux Morins, au centre les batailles des marais de Saint-Gond et
de Vitry, et à l'est la bataille de Revigny.
Articles détaillés : Bataille de l'Ourcq (1914) et Bataille des Marais de
Saint-Gond.
Au cours de cette bataille décisive, les troupes franco-britanniques arrêtent
puis repoussent les Allemands, mettant ainsi en échec le plan Schlieffen qui
prévoyait l'invasion rapide de la France en passant par la Belgique, pour éviter
les fortifications françaises de l'Est et ensuite se reporter contre la Russie.
La retraite allemande se termine sur la rive droite de l'Aisne dès le 14
septembre, ce qui déclenche la bataille de l'Aisne.
Prélude à la bataille
La situation militaire au début de la Première Guerre mondiale est très en
faveur des forces armées allemandes, qui viennent de remporter pendant la
seconde partie du mois d'août 1914 une série de victoires sur tous leurs
adversaires, que ce soit sur le front de l'Ouest en Lorraine (bataille de
Morhange le 20 août) ou en Belgique (batailles des Ardennes du 21 au 23 août, de
Charleroi du 21 au 23 et de Mons le 23), comme sur le front de l'Est (bataille
de Tannenberg du 26 au 29 août).
Article détaillé : Bataille des Frontières.
« Les armées allemandes sont entrées en France, de Cambrai aux Vosges, après une
série de combats continuellement victorieux. L'ennemi, en pleine retraite, n'est
plus capable d'offrir une résistance sérieuse. »
— Communiqué allemand du 27 août 1914.
De son côté, le communiqué français du même jour annonce que « dans le Nord, les
lignes franco-anglaises ont été légèrement ramenées en arrière. », celui du 29
août au soir évoque la retraite à mots couverts : « la situation de notre front,
de la Somme aux Vosges, est restée aujourd'hui ce qu'elle était hier. Les forces
allemandes paraissent avoir ralenti leur marche».
Grande Retraite
Si sur le plateau lorrain et dans les Vosges l'armée française arrête sa
retraite dès le 23 août et arrive à tenir ses positions face aux attaques
allemandes (bataille de la trouée de Charmes du 24 au 26 août), toutes les
unités françaises et britanniques qui s'étaient avancées en Belgique battent en
retraite à partir du soir du 23 août.
Un soldat français, son arme et son sac à dos : en plus de son fusil (4,4 kg),
il doit porter un sac de 8,3 kg.
Une telle retraite s'explique par la disproportion des forces entre d'une part
les Allemands et d'autre part les Franco-Britanniques : l'état-major allemand
avait fait le choix de masser face à la Belgique et au Luxembourg la majorité de
ses unités, à raison de 59 divisions (soit un total de 1 214 160 combattants)
regroupées au sein de cinq armées (numérotées de I à V) formant l'aile droite
allemande, tandis que la défense de l'Alsace-Lorraine était confiée à une aile
gauche plus faible avec 16 divisions (soit 402 000 combattants) regroupées dans
deux armées (nos VI et VII). En comparaison, les Français n'avaient prévu
initialement de déployer lors de leur mobilisation que les 16 divisions (soit
299 350 hommes) de la 5e armée face à la Belgique, rapidement renforcées jusqu'à
compter 45 divisions (soit 943 000 hommes) au moment de la bataille des
Frontières, grâce à l'envoi des 3e et 4e armées françaises ainsi que du corps
expéditionnaire britannique.
Articles détaillés : Plan Schlieffen, Ordre de bataille allemand, Plan XVII et
Ordre de bataille français.
Dominées numériquement et en danger d'être contournées par le flanc, les armées
franco-britanniques repassent rapidement la frontière franco-belge pour se
réfugier en France, puis foncent vers le sud-sud-ouest : cette retraite
franco-britannique s'éternise pendant quinze jours, jusqu'au début du mois de
septembre, moment où les troupes arrivent à hauteur de Paris.
« On a vu déjà les effets dissolvants de ces marches en retraite répétées, le
plus souvent de nuit [...]. Effectifs fondus, nombreux traînards tombés aux
mains de l'ennemi, bagages perdus, fusils et canons enlevés et, surtout,
disparition du moral de la troupe ; tels étaient les résultats des retraites
effectuées ces derniers jours par nos différentes armées. »
— État des lieux par le général Galliéni, au tout début de septembre 1914.
Redéploiement français
Convoi de fourrage arrivant dans le bois de Boulogne, où sont parqués des
troupeaux de bovins : le camp retranché de Paris se prépare en catastrophe à un
siège.
Situation à la fin d'août 1914 : l'aile droite allemande a traversé la Belgique
et le Nord de la France jusqu'à l'Aisne, tandis que les offensives françaises en
Alsace-Lorraine et dans l'Ardenne ont échoué.
Le commandant en chef français, le général Joffre, garde malgré tout l'espoir
d'un rétablissement, et dans son rapport au ministre de la Guerre Adolphe
Messimy, il affirme que l'armée française peut encore lancer une contre-attaque
victorieuse. Il rejette la responsabilité de la défaite et des replis sur ses
subalternes, critiquant ses généraux qu'il estime ne pas avoir été assez
offensifs. Il prend des sanctions et limoge ceux qu'il juge incompétents, y
compris les commandants d'armée tel que les généraux Ruffey (3e armée, remplacé
le 30 août par Sarrail) et Lanrezac (5e armée, remplacé le 5 septembre par
Franchet d'Espèrey). Aux échelons inférieurs, c'est un total de huit commandants
de corps d'armée et 38 de division qui sont « limogés » par Joffre entre le 10
août et le 6 septembre.
Toutefois, Joffre est aussi conscient du fait qu'il doit d'abord céder du
terrain. Il ordonne donc dès la fin d'août aux armées françaises en retraite
d'opérer des contre-attaques localisées et très temporaires pour retarder un peu
la poursuite allemande et gagner du temps : la IVe armée allemande est ainsi
contre-attaquée par la 4e française le 27 autour de Sedan, puis la IIIe
allemande à Signy-l'Abbaye, enfin la IIe armée allemande par la 5e française le
29 autour de Saint-Quentin et de Guise (bataille de Guise le 29 août).
Le 25 août, l'état-major français prévoit d'arrêter la retraite derrière la
Somme et l'Aisne. Six divisions sont prélevées sur le front d'Alsace-Lorraine et
envoyées à partir du 27 août par chemin de fer en renfort autour de Péronne,
d'Amiens et de Montdidier, regroupées au sein de la 6e armée créée pour
l'occasion. Mais le débarquement de ces troupes est menacé dès le début de
l'opération par l'approche des unités de cavalerie allemandes : le projet de
bataille sur la ligne Somme-Aisne est annulé le 31 août et la 6e armée se joint
à la retraite.
Le 2 septembre, Joffre annonce à ses commandants d'armée son projet de
rétablissement le long de la Seine et de l'Aube, y comptant s'y fortifier et
recompléter les troupes (par des envois des dépôts) avant de passer à
l'offensive. L'intervalle entre les 5e et 4e armées françaises est comblé dès le
29 août par l'envoi de huit divisions prélevées ailleurs, créant ainsi la 9e
armée le 5 septembre ; l'intervalle entre la 5e armée et l'armée britannique est
colmaté par deux divisions de cavalerie. Tous ces renforts arrivent par voies
ferrées, utilisées comme rocade pour faire une manœuvre par les lignes
intérieures, ce qui permet le renforcement de l'aile gauche française : de 45
divisions le 23 août, elle passe à 57 le 6 septembre puis 70 le 9 septembre.
Poursuite par les Allemands
Les transmissions entre l'OHL et ses armées, notamment la Ire, sont difficiles :
l'aile droite avance trop vite pour que la transmission filaire soit assurée,
tandis que les postes de radio ont une faible portée.
Côté allemand, l'aile droite s'est lancée immédiatement après ses victoires de
la bataille des Frontières à la poursuite des Français et des Britanniques, les
divisions de cavalerie allemandes en tête. Cette poursuite est menée le plus
rapidement possible : les étapes réalisées sont au maximum de 40 à 45 kilomètres
par jour pour la Ire armée allemande, la plus à l'ouest, dans l'espoir de
rattraper leurs adversaires. Le 27, le chef de l'état-major allemand, le général
von Moltke, envoie à ses commandants d'armée une Directive générale mentionnant
la possibilité d'un rétablissement français sur l'Aisne ou la Marne, et
ordonnant les axes de marche suivant :
« Sa Majesté ordonne que l'armée allemande se porte en direction de Paris : la
Ire armée, avec le deuxième corps de cavalerie, marchera à l'ouest de l'Oise,
vers la basse-Seine. La IIe armée, avec le premier corps de cavalerie, poussera
entre La Fère et Laon sur Paris […]. La IIIe […] progressera entre Laon et
Guignicourt, sur Château-Thierry […]. La IVe […] marchera, par Reims, sur
Épernay […]. La Ve […] s'avancera vers la ligne Châlons-Vitry […]. Verdun sera
investi. […] Si l'ennemi oppose une forte résistance sur l'Aisne et
ultérieurement sur la Marne, il pourra être nécessaire de faire converger les
armées de la direction du sud-ouest dans la direction du sud. »
— Directive générale du commandement Suprême pour la continuation des opérations
du 27 août.
La composition des cinq armées de l'aile droite allemande a évolué depuis la
mobilisation du début d'août, par la réaffectation de plusieurs unités. Six
divisions sont laissées en arrière pour assurer la prise des places fortes
adverses (d'une part les 3e et 9e corps de réserve au siège d'Anvers, d'autre
part le 7e de réserve et une brigade du 7e corps au siège de Maubeuge) ou en
mission d'occupation (une brigade du 4e corps de réserve à Bruxelles, ainsi que
quatre brigades de Landwehr à Liège et Namur). S'y rajoute le transfert par
chemin de fer de quatre autres divisions vers le front de l'Est (le corps de
réserve de la Garde et le 11e corps d'armée libérés par la prise de Namur le 25
août). En conséquence, le total des forces allemandes engagées à l'ouest de
Verdun le 5 septembre est de 44 divisions d'infanterie et de 7 divisions de
cavalerie, soit environ 900 000 hommes et 2 928 canons.
Le 30 août, la Ire armée allemande, répondant à l'appel à l'aide de la IIe
attaquée à Guise, marche vers le sud-sud-est au lieu du sud-ouest ; Moltke
valide ce choix le soir même, ordonnant la conversion de l'aile vers le sud, en
évitant Paris : la Ire désormais sur Meaux, la IIe sur Épernay et la IIIe sur
Châlons. Le 2 septembre à 23 h 37, l'OHL envoie l'ordre suivant : « Intention du
Commandement Suprême est de refouler les Français en direction du sud-est en les
coupant de Paris. Ire armée suivra la IIe en échelon et assurera en outre
couverture du flanc des armées ».
« Anglais et Français […] étaient une proie qui s'offrait aux coups des
Allemands et qu'il fallait saisir avant qu'ils aient pu s'arrêter, se fortifier
et se reconstituer. On s'occuperait de Paris ensuite. Mais cette opération
obligeait les Allemands à défiler, à 40 kilomètres environ, à l'est du camp
retranché : c'était montrer un mépris non déguisé pour l'armée de Paris et,
j'ajouterai, pour son chef. »
— Le général Galliéni, gouverneur militaire de Paris.
Prise d'initiative
Le 3 septembre, des aviateurs français découvrent que les colonnes de la Ire
armée allemande infléchissent leur marche vers le sud-est et ne marchent donc
plus droit sur Paris. Ces aviateurs en avertissent un officier, qui se trouve
être Alfred Dreyfus. Ce dernier les laisse avertir directement l'état-major
malgré son grade supérieur ; l'information est confirmée par les reconnaissances
de cavalerie le 4 au matin.
Le 4, le gouverneur militaire de Paris, le général Galliéni, donne ordre à la 6e
armée française (alors sous ses ordres) de se redéployer au nord-est de Paris et
de marcher vers l'est entre l'Ourcq et la Marne, prenant ainsi l'initiative
d'engager la bataille. Le commandant en chef Joffre, qui voulait attendre
quelques jours de plus, est convaincu par une discussion par téléphone et donne
ordre le 4 au soir à toutes les armées françaises de se préparer à faire front :
« il convient de profiter de la situation aventurée de la Ire armée allemande
pour concentrer sur elle les efforts des armées alliées d'extrême-gauche. Toutes
dispositions seront prises dans la journée du 5 septembre en vue de partir à
l'attaque le 6 ». Le 5 au matin, cet ordre est complété par un deuxième destiné
à la 3e armée qui « se couvrant vers le nord et le nord-est débouchera vers
l'ouest pour attaquer le flanc gauche des forces ennemis qui marchent à l'ouest
de l'Argonne ».
Puis Joffre informe le ministre de la Guerre Millerand, réfugié à Bordeaux
devant la menace pesant sur Paris : « […] la lutte qui va s'engager peut avoir
des résultats décisifs, mais peut aussi avoir pour le pays, en cas d'échec, les
conséquences les plus graves. Je suis décidé à engager toutes nos troupes à fond
et sans réserve […] ».
Enfin, un ordre du jour est adressé le 6 au matin à toutes les troupes
françaises. Cet ordre du jour a été trouvé le 6 au soir par les Allemands sur le
champ de bataille près de Vitry, et a été transmis par téléphone du colonel von
Werder (de l'état-major de la IIIe armée) au lieutenant-colonel Tappen (de l'OHL).
Affrontements
La bataille de la Marne se subdivise en cinq batailles plus restreintes, de
l'ouest vers l'est :
• la bataille de l'Ourcq ;
• la bataille des Deux Morins ;
• la bataille des Marais de Saint-Gond ;
• la bataille de Vitry ;
• la bataille de Revigny.
Bataille de l'Ourcq
La bataille de l'Ourcq désigne les combats du 5 au 9 septembre sur la rive
droite de la Marne, entre Nanteuil-le-Haudouin et Meaux, entre la 6e armée
française (commandée par le général Maunoury) et l'aile droite de la Ire armée
allemande (du général von Kluck).
La 6e armée française se met en marche vers l'est dès le 4 sur ordre du
gouverneur militaire de Paris Galliéni, ses têtes de colonne rencontrant le 5
septembre le 4e corps de réserve allemand (laissé en flanc-garde par Kluck), qui
contre-attaque en soirée. Les quatre autres corps de la Ire armée allemande sont
alors déjà sur la rive gauche de la Marne, en train de s'aligner sur le Grand
Morin : les Français menacent ainsi le flanc mais aussi les arrières de Kluck.
Les combats s'amplifient les jours suivants, entre Meaux au sud et
Nanteuil-le-Haudouin au nord, du 6 jusqu'au 9 septembre.
Côté allemand, l'état-major de la Ire armée renforce très rapidement son flanc
en rappelant le 2e corps qui était arrivé à Coulommiers le 5 : dès le lendemain,
il est engagé de part et d'autre du 4e corps de réserve. Le 7, c'est au tour du
4e corps d'armée d'arriver, tandis que les deux derniers corps allemands (3e et
9e) retraversent la Marne (ordre du 7 à 10 h 15) : l'ensemble de la Ire armée,
qui marchait vers le sud, est ainsi redéployé face à l'ouest. Côté français,
face à ces puissantes forces allemandes, la 6e armée reçoit aussi des renforts,
cinq divisions envoyées par Galliéni, pour alimenter la bataille : une brigade
(de la 7e DI) est même acheminée de Paris à Nanteuil à bord de taxis
réquisitionnés.
Le 9, les renforts allemands (le 9e corps) lancent une attaque de Betz vers
Nanteuil : la 6e armée française est menacée d'enveloppement par le nord et n'a
plus de réserve à engager. Mais à midi, le lieutenant-colonel Hentsch, envoyé
par l'OHL, arrive à l'état-major de la Ire allemande et annonce la retraite de
la IIe armée depuis le matin. Malgré l'opposition du chef d'état-major Kuhl qui
fait état des chances de victoire sur la 6e armée française, le danger sur
l'aile gauche oblige la Ire armée à suivre la retraite. Le décrochage allemand
se fait dans l'après-midi du 9, les troupes françaises ne poursuivant que très
lentement du fait de leur épuisement.
Bataille des Deux Morins
La bataille des deux Morins désigne les combats du 6 au 9 septembre en Brie
champenoise, d'abord sur le Grand Morin puis sur le Petit Morin, entre d'une
part le corps expéditionnaire britannique (commandé par le maréchal French) et
la 5e armée française (du général Franchet d'Espèrey) et d'autre part la gauche
de la Ire armée allemande (du général von Kluck) et la droite de la IIe armée
(du général von Bülow).
Côté allemand, le redéploiement de la Ire armée allemande sur la rive droite de
la Marne laisse un intervalle de 40 km entre celle-ci et la IIe armée, masqué
par les 1er et 2e corps de cavalerie (total de cinq puis quatre divisions), que
l'état-major de la Ire armée ordonne de renforcer par deux brigades d'infanterie
(ordre du 8 septembre au 9e corps). Ces expédients retardent l'avance prudente
des Franco-Britanniques (cinq divisions d'infanterie du BEF, la division de
cavalerie britannique et trois divisions de cavalerie françaises, sans compter
la gauche de la 5e armée française), le 6 et 7 sur le Grand Morin, le 7 et 8 sur
le Petit-Morin, le 8 sur le Dolloir et la Marne.
Côté français, le GQG n'identifie la brèche qu'à partir du 8, Joffre envisageant
alors d'envoyer les Britanniques au nord de la Marne pour menacer les arrières
de la Ire armée allemande, tandis que la 5e armée française doit attaquer au
nord de Montmirail. Mais le 8 au soir, Henstch arrive à l'état-major de la IIe
armée : le lendemain 9 septembre au matin, le chef d'état-major Lauenstein
décide avec lui de faire battre en retraite son armée, qui est menacée sur sa
droite, derrière la Marne. Les divisions britanniques franchissent au même
moment la Marne à Charly et Nanteuil, tandis que la cavalerie française atteint
Château-Thierry.
Bataille des marais de Saint-Gond
La bataille des marais de Saint-Gond désigne les combats du 6 au 9 septembre,
entre Sézanne et Mailly-le-Camp, entre d'une part la 9e armée française
(commandée par le général Foch) et d'autre part la gauche de la IIe armée
allemande du général von Bülow et l'aile droite de la IIIe armée du général von
Hausen.
Dans la nuit du 4 au 5 septembre, Joffre prescrit à Foch d'entreprendre une
action offensive sur les troupes allemandes présentes devant son armée. Le 6
septembre, les troupes françaises commencent leur mouvement vers le nord mais
sont rapidement contenues par les troupes allemandes. Foch est contraint
d'établir des positions défensives et de les protéger.
Du 6 au 8 septembre, les combats sont de plus en plus intenses, sur l'aile
gauche, les troupes françaises s'opposent au Xe corps allemands et à une partie
du corps de la Garde, plusieurs villages sont pris et perdus plusieurs fois. Au
centre du dispositif français, les troupes présentes au nord des marais de
Saint-Gond sont rapidement repoussées mais toutes les tentatives du corps de la
garde pour franchir les marais sont bloquées. L'aile droite de la 9e armée
française, formée par le 11e corps d'armée subit la pression d'une partie du
corps de la garde et du XIIe corps de réserve allemand, elle est obligée de se
replier hors des villages de Moirans-le-Petit, d'Écury-le-Repos et de Normée.
Le XIIe corps de réserve allemand est renforcé par des troupes du XIIe corps
d'armée et soutenu par la 2e division de la garde, au cours d'une attaque de
nuit entre le 8 et le 9 septembre, l'aile droite française est enfoncée
entraînant le repli des troupes au centre du dispositif de la 9e armée
française. Dans la journée du 9 septembre, Foch prend le contrôle du 10e corps
d'armée français, initialement aux ordres de la 5e armée française, sur son aile
gauche. Il peut ainsi dégager la 42e division d'infanterie pour se constituer
une réserve. L'aile gauche de la 9e armée est fortement attaquée, elle cède le
village et le château de Mondement, un point d'observation qui domine le champ
de bataille. Le soir même, le 77e régiment d'infanterie soutenu par l'artillerie
de la 42e DI et par la division marocaine reprend le château.
La 42e division est dirigée vers Fère-Champenoise pour combattre les troupes
allemandes qui en débouchent. Le 10 septembre devant la pression de la 5e armée
française, la IIe armée allemande entame un mouvement de repli pour éviter
l'enveloppement. Ce mouvement entraîne également le repli des troupes de la IIIe
armée allemande. Foch et son armée restent maîtres du champ de bataille et
entament la poursuite des troupes allemandes.
Bataille de Vitry
Sermaize-les-Bains : la rue Lombard après la bataille de la Marne (carte postale
ancienne).
La bataille de Vitry désigne les combats du 6 au 10 septembre en Champagne
crayeuse, de part et d'autre de la ville de Vitry-le-François entre l'aile
gauche et le centre de la 4e armée française commandée par le général de Langle
de Cary et l'aile droite de la IVe armée allemande du duc de Wurtemberg et
l'aile gauche de la IIIe armée allemande du général von Hausen.
Les attaques allemandes au centre du dispositif de la 4e armée française
entraînent le resserrement de sa ligne de front, le 17e corps d'armée
initialement chargé de la liaison avec la 9e armée français est contraint de
prêter main forte aux troupes attaquées. Ce mouvement est masqué dans un premier
temps par la 9e division de cavalerie puis à partir du 8 septembre par l'arrivée
des Vosges du 21e corps d'armée. Ce renfort permet d'attaquer la IIIe armée
allemande puis de commencer l'enveloppement de la IVe armée allemande à partir
du 10 septembre.
Bataille de Revigny
La bataille de Revigny désigne les combats du 6 au 12 septembre au sud de
l'Argonne, autour de Revigny-sur-Ornain, entre l'aile droite de la 4e armée
française formée du 2e corps d'armée, l'aile gauche de la 3e armée française
commandée par le général Sarrail et l'aile gauche de la IVe armée allemande et
de la Ve armée allemande (du prince-héritier de Prusse).
Les troupes allemandes tentent au cours de cette bataille de percer les lignes
françaises en lançant par des combats frontaux très meurtriers. Les troupes
françaises sous la pression sont contraintes d'adopter une posture défensive,
l'arrivée du 15e corps d'armée en provenance de Lorraine permet au général
Sarrail de renforcer son aile gauche malmenée par les attaques allemandes et
d’empêcher la rupture du front.
Le 10 septembre, la IIe armée allemande, menacée d'enveloppement par la 5e armée
française, commence sa manœuvre de repli entraînant avec elle le retrait de la
IIIe armée allemande. Le 12 septembre, le centre de la 4e armée française entame
un mouvement de débordement obligeant la IV armée allemande à rompre le combat
et à se replier sur une ligne défensive au delà de l'Argonne. La Ve armée
allemande également menacée est contrainte de se replier en passant entre le
massif de l'Argonne et la place fortifiée de Verdun.
Suites et conséquences
Cavalerie française encadrant des prisonniers allemands.
Le coup d'arrêt de la Marne marque l'échec de la manœuvre allemande à travers la
Belgique et le Nord de la France (surnommée « plan Schlieffen »). Mais, selon le
mot du général Chambe, alors jeune officier de cavalerie, « ce fut une bataille
gagnée mais une victoire perdue » : en effet, si les armées franco-britanniques
mirent alors un terme à l'avancée irrésistible des armées allemandes commandées
par Moltke, elles ne purent ou ne surent exploiter cet avantage en repoussant
ces armées hors du territoire français. D'une part, les troupes françaises sont
trop épuisées et affaiblies pour se lancer dans une poursuite. D'autre part,
l'état-major allemand avait redéployé une partie de ses forces, envoyant de
Lorraine plusieurs corps d'armée en renfort sur leur aile droite.
L'aile droite allemande s'arrête dès le 13 septembre, s'installant sur les rives
de l'Aisne : les attaques françaises et britannique n'arrivent pas à les
repousser lors de la bataille de l'Aisne et cette partie du front se stabilise
en s'enterrant dans des tranchées.
Recherchant la décision par une série de tentatives mutuelles d'enveloppement
vers l'ouest puis vers le nord, menant les belligérants jusqu'aux rives de la
mer du Nord, lors de combats appelés la « course à la mer » (septembre à
novembre 1914).
Historiographie
Point de vue français
Présentation de Joffre ou de Galliéni comme initiateur de la bataille.
Charles Péguy est mort au combat à Villeroy le 5 septembre. Le père de
l'écrivain Albert Camus est mort des blessures subies lors de cette bataille.
Point de vue allemand
Question de la responsabilité de Moltke, de Hentsch ou de Bülow.
En réaction à la victoire franco-britannique lors de cette bataille, les prises
de décision de l'empereur d'Allemagne furent mises à mal, ce qui provoqua en
Allemagne la rédaction spontanée d'un manifeste par 93 intellectuels germaniques
de renommée internationale, le 4 octobre 1914. Ce document avait pour fonction
de montrer au monde entier le soutien univoque de la classe dirigeante et des
intellectuels allemands à leur souverain Guillaume II.
Seconde bataille de la Marne
La seconde bataille de la Marne s'est déroulée principalement du 15 au 20
juillet 1918, dans le nord-est de la France, vers la fin de la Première Guerre
mondiale.
Offensive Michael
Opération Michael (sur le front de l'Aisne et de la Marne), opération allemande
du printemps 1918 appelée également bataille de l'Empereur.
Libérées du front de l’est par le traité de Brest-Litovsk les divisions
d'infanterie allemandes sont amenées rapidement par le chemin de fer.
L'« opération Michael » commença le matin du 21 mars 1918 en Picardie, par un
bombardement d'artillerie assez court mais extrêmement violent. Avant que les
défenseurs britanniques étourdis ne puissent réagir, des équipes spéciales de
troupes d'assaut allemandes sortirent du brouillard et de la fumée pour attaquer
ou contourner les points stratégiques des lignes. Pris par surprise, débordés et
submergés, les défenseurs reculèrent sur tout le front, une large brèche
s'ouvrit, permettant aux Allemands d'avancer de plus de 50 km. Plus de 160 000
Britanniques furent mis hors de combat.
Mais la percée ne réussit pas, parce qu'Erich Ludendorff, qui ne rencontrait
pourtant que peu d'opposition sur sa gauche, continua à concentrer ses réserves
devant Arras, où la résistance britannique devint de plus en plus forte. Malgré
les appels désespérés de Haig, Foch refusa d'engager ses réserves restreintes.
Haig dut faire venir d'urgence des renforts du Royaume-Uni et le QG britannique
dut retirer des divisions d'autres théâtres d'opérations.
Ce n'est que le 28 mars que Ludendorff songea brusquement aux possibilités qui
se présentaient du côté de la Somme, pour effectuer une percée rapide et
décisive en direction de Paris, mais il était trop tard. Deux jours auparavant,
les Alliés s'étaient mis d'accord pour confier au général Foch le commandement
unique sur le front occidental. Un de ses premiers actes de commandement fut
d'employer une partie de ses maigres réserves pour boucher la dangereuse brèche
sur la Somme. Au début d'avril l'offensive Michael était arrêtée dans la région
de Montdidier.
Offensive dans l’Aisne
Forces en présence lors de la bataille de l'Aisne le 27 mai 1918 et Bataille de
l'Aisne (1918).
Troupes françaises sous le commandement du général Gouraud, avec leurs
mitrailleuses parmi des ruines d'une église près de la Marne, repoussant les
Allemands. 1918.
Ludendorff concentre 42 divisions sous le commandement de von Boehn, chef de la
VIIe Armée, qui tient le front entre Pontoise-lès-Noyon et Berry-au-Bac. L'aile
gauche de la VIIe Armée est prolongée par 4 divisions de la Ire Armée (von Below)
qui occupent le secteur de Berry-au-Bac à Reims et prendront part à l'attaque.
Le 27 mai, l’offensive allemande se déclenche près de l’Aisne, à partir du
Chemin des Dames, où, l’année précédente, les Français avaient échoué dans une
attaque meurtrière. La préparation d’artillerie commence par un tir d’obus à
gaz, puis devient mixte, mais avec plus de cinquante pour cent d’obus toxiques.
Après le 5 juin, 5 autres divisions seront encore engagées, soit au total 47
divisions, correspondant à près de 60 françaises. L’offensive s’arrête pourtant
dix jours plus tard en raison de l'épuisement des assaillants, mais ceux-ci ont
avancé de 45 km, pris Château-Thierry et sont à 70 km de Paris. Ils devaient
absolument tâcher de rectifier leurs lignes, en conquérant du terrain entre les
deux saillants importants près d'Arras et de Reims, et un autre plus petit le
long de la Lys. Ils appliquèrent d'abord leur effort aux deux zones qui
encadraient Compiègne, en attaquant par les deux flancs le 9 juin. Mais leur
offensive était assez mal organisée et ils durent subir eux-mêmes des attaques
au gaz moutarde, de sorte que les troupes françaises, bien secondées par la 2e
division d’infanterie américaine à Bois-Belleau et à Vaux, purent résister.
La contre-offensive alliée du 18 juillet au 6 août
Au moment même où les divisions allemandes se massent vers le flanc est de la
poche, l'équivalent de 21 divisions alliées se hâtent vers le flanc ouest à
partir de la forêt de Villers-Cotterêts.
Le colonel Grasset, dans l'ouvrage « la Grande guerre racontée par les
combattants », édition 1922, donne un descriptif intéressant des troupes alliées
qui se sont élancées à partir du 18 juillet 1918 pour la seconde bataille de la
Marne : "Les 26e, 69e, 167e, 168e, 169e, 164e, 418e, 265e, 72e, 91e, 136e, 23e,
42e, 128e, 48e, 70e, 71e, 9e, 11e, 20e, 8e, 110e, 208e, 133e, 152e, 170e, 174e,
409e régiments d'infanterie française; les 1er, 4e, 8e, 9e zouaves français; les
7e, 8e, 9e tirailleurs algériens; les 1er et 4e mixtes zouaves-tirailleurs; les
2e, 4e, 41e, 43e, 59e bataillons de chasseurs à pied ou alpins français; les
régiments marocains, malgaches et russes, ainsi que la 1ère Division
d'Infanterie américaine, la Big Red One, se ruent à l'assaut. Enfin les nouveaux
chars Renault FT 17 sont employés pour la première fois et rencontrent le succès
partout où ils sont engagés.
En deux jours, le nombre des prisonniers dépasse 17 000 hommes et 360 canons ont
été capturés. Surpris, les Allemands engagent 4 divisions de renfort au centre.
Vers 18 heures, ils ont repris Vierzy, mais sans le garder. Les Alliés sont à
moins de 15 kilomètres de la gare de Fère-en-Tardenois, l’unique voie ferrée
étant sous le feu de l'artillerie. Le 20, les Allemands prélèvent des divisions
sur les armées voisines et engagent la 5e division de la Garde contre l'armée
Degoutte, deux divisions et des éléments retirés de la Marne, contre l'armée
Mangin.
Malgré ces renforts, le 28 juillet la gare est prise par les Alliés et le 7 août
tout le terrain est repris. Les chars d’assaut ont prouvé leur efficacité.
Offensive de Mangin (10e armée) entre l'Oise et l'Ourcq
18 juillet:
•
o Progression du 1er corps d'armée dans la vallée de l'Aisne
o Engagement du 11e corps d'armée, 20e corps d'armée et du 30e corps d'armée
dans la bataille du Soissonnais et de l’Ourcq
• 29 juillet : Engagement du 11e corps d'armée, 20e corps d'armée et du 30e
corps d'armée dans la bataille du Tardenois
• 2 août : Réoccupation de Soissons par le 1er corps d'armée
Offensive de Degoutte (6e armée) entre l'Ourcq et la Marne
9 divisions dont 3 américaines
o 18 juillet : deuxième bataille de la Marne, du Soissonnais et de l’Ourcq
o 21 juillet : Château-Thierry
o 29 juillet : bataille du Tardenois
Offensive de de Mitry (9e armée) au sud de la Marne
• 17 juillet : introduction de la IXe armée sur le front entre
Festigny-les-Hameaux à droite et Vaux à gauche
• 18 juillet : Engagement dans la deuxième bataille de la Marne : offensive vers
la Marne
• 20 juillet : Franchissement de la Marne
• 25 juillet : retrait du front
Offensive de Berthelot (5e armée) à l'ouest de Reims
• 16 divisions dont 2 italiennes et 3 américaines
o 18 juillet au 6 août : progression au nord de la Marne, combats sur l’Ardre et
à l’ouest de Reims
Bilan
Le décret du 7 août, nommant le général Foch Maréchal de France, motivait cette
nomination par le simple résumé des résultats obtenus dans la deuxième victoire
de la Marne :
« ... Paris dégagé, Soissons et Château-Thierry reconquis de haute lutte, plus
de 200 villages délivrés, 35 000 prisonniers allemands, 700 canons allemands
capturés, 3 300 mitrailleuses allemandes capturées, les espoirs hautement
proclamés par l’ennemi avant son attaque écroulés, les glorieuses armées alliés
jetées dans un seul élan victorieux des bords de la Marne aux rives de l’Aisne,
tels sont les résultats d’une manœuvre aussi admirablement conçue par le haut
commandement français que superbement exécutée par des chefs et des soldats
incomparables. »
Mais, le nouveau maréchal pense déjà à réduire les saillants de Montdidier et de
la Lys et va engager la troisième bataille de Picardie.
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