JMO 51° RIC

14 juin 1940

 

 

L’attaque allemande du 14/06/1940.

La défense du « KNOP » et de SARRALBE.


 

La nuit du 13 au 14 est calme, troublée seulement par quelques tirs de notre artillerie.

Des bruite de moteurs, des lancements de fusées chez l’ennemi entretiennent les nôtres en alerte.

Au lever du jour, il y a du brouillard sur tous les fronts, qui gêne l’observation.

En 1ère ligne, tous les guetteurs sont à leur poste.

 

A 6h30, l’artillerie allemande ouvre le feu sur la position fortifiée, sur 30 kilomètres de front, de Saint Arnold à Sarralbe.

 

Dans le sous-secteur, les quartiers I et II/51 sont l’objet de bombardements très denses d’obus de petit et moyen calibres pendant deux heures.

Le quartier III/51 ne reçoit aucun projectile et semble hors de la limite de l’attaque.

 

Le Knop est bouleversé par une effroyable concentration d’obus de tous calibres, y compris de gros minen qui le couvrent de fumée.

Les abris de résistance des I et II sont bons et résistent bien.

 

Le PC du sous-secteur, situé dans la villa d’un marbrier à Keekastel est sous le feu mais ne paraît pas particulièrement visé.

Son ancien abri de combat du Mitterwald, où il n’y a plus personne, est écrasé d’obus. Les batteries autour de Kisviller à Hinsingen sont très bombardés.

 

Entre 8h15 et 8h20, la position est couverte de fumigènes et les blocs de 1ère ligne ( crêtes de Sarralbe ) sont en butte à des tirs d’embrasure précis de canons amenés à très courte distance.

 

A 6h30, les tirs s’allongent et l’infanterie débouche de ses bases de départ. L’ennemi monte à l’assaut de l’avancée d’Halvig ( sous-secteur du 41 ) et attaque le Knop de front en partant des bois d’Ekschachen.

Au Knop, l’adjudant DRIANNE qui a refusé deux jours avant la relève malgré l’état de fatigue de sa troupe est à l’honneur et offre une magnifique défense.

 

La première attaque de la compagnie du Lieutenant Von Ketelhodt est brisée au départ. L’artillerie déclenche son barrage avec bonheur.

Les troupes d’assaut perdent 3 officiers, le chef des pionniers et son adjoint et 9 hommes.

Les canons destinés aux tirs d’embrasure sont hors de combat.

Les mortiers lourds reprennent leur pilonnage.

Sous la protection de leurs tirs, les troupes d’assaut s’approchent à 30 mètres.

 

Au poste de combat Ouest, le sergent GILLON, avec un FM, stoppe une tentative de débordement et fauche les servants des canons. Les grenadiers font barrage avec courage.

Les pertes ennemies se multiplient mais les nôtres sont lourdes.

 

Le bloc saute avec tout son équipage.

 

L’ennemi parvient à déborder le Knop par l’ouest et à pénétrer à la grenade à l’intérieur.

 

L’adjudant DRIANNE, debout sur le parapet, pistolet au poing, vide son chargeur.

Il est fauché par une mitraillette, est inanimé et est très grièvement blessé.

La garnison, réduite à 17 hommes dont des blessés, est cernée dans es abris souterrains et est mise hors de combat.

Il est près de 10h.

Pendant plus d’une heure et demi, le Knop a tenu en échec une puissante attaque très préparée pendant 9 jours par des troupes d’assaut spécialisées.

Il a succombé.

Sa double mission a été pleinement remplie :

 

1-     Pendant 10 jours et 10 nuits, son chef a inlassablement renseigné le commandement sur les mouvements ennemis dans les forêts de Sarralbe

 

2-     Le jour de l’attaque, l’observatoire du Knop a été à nous et inutilisable par l’ennemi.

 

La défense du Knop par l’adjudant DRIANNE s’inscrit dans les annales du 51° RIC comme un exemple unique d’esprit de sacrifice et d’héroïsme.

 

Sur le front du I/51, le régiment du colonel SCHWELB de la 70° DI allemande, couvert sur ses flancs par les attaques sur Holvig et sur le Knop, débouche à la même heure du bois d’Eckschachen et vient coller au bombardement sur le Moderbach.

 

Le bataillon de tête (major WETARL) plus une section d’obusiers lourds, une section de mitrailleuses, une de DCA, 2 sections de canons anti-chars et une section d’artillerie d’assaut a pour objectif le Buschhubelwald.

 

La direction de l’attaque va de Kirsvller- Hinsinger en passant par Schmeix.

La pointe de la compagnie de tête franchit dans la fumée le Moderbach et surprend 2 emplacements de mitrailleurs, section PRÉLAT.

 

Après un cours combats les emplacements sont pris mais le Lieutenant PRÉLAT et ce qui reste de la section arrête l’ennemi à la grenade et l’empêche de progresser dans les bois.

 

Le barrage des mitrailleuses très puissant par les points d’appui voisins des lieutenants CHAMERTIAC, SEGUIN et du sergent-chef BRIHIO cloue au sol et décime la compagnie d’assaut.

Il coupe de ses arrières le groupe ennemi tapis dans les bois de Buschubelwald.

 

A 10h30, une contre-attaque menée par les 2 pelotons de lanciers polonais ( Capitaine de VESVATTRE ), chef de l’EM du III/51, reprend les deux ouvrages perdus.

Le groupe ennemi est fait prisonnier ou détruit.

 

Cela rétablit intégralement la ligne de bataille.

 

Les mortiers du capitaine BRUYANT achèvent d’écraser l’attaque et détruit un canon qui vient de se mettre en position de tir.

 

Aux avant-postes du I/51, les blocs de 1ère ligne de la cote 244 et de l’Étang Solvay sont rapidement détruits par les coups d’embrasures tirés en plein front.

 

Les garnisons, avec les blessés et les tués, se replient en 2ème ligne avec le sous-lieutenant PARODI et le sergent WERGNET tous deux blessés.

 

L’attaque ennemie franchit les crêtes 252 et 244 et tombe sous le feu très meurtrier de la section GAITTE, embusquée dans les caves de Bellevue et qui la prend de flanc.

 

Elle parvient à submerger les positions à l’est.

Le point d’appui de la Tuilerie est encerclé et le Lieutenant COULON et le groupe des mitrailleuses parviennent seuls à se replier.

Le Lieutenant SANDER est blessé en faisant se replier ses canons de 25.

 

Le groupe de mortiers est encerclé et son chef, le sergent-chef de GUILLERNIC, après une héroïque défense, se brûle la cervelle pour ne pas tomber dans les mains de l’ennemi.

 

Le capitaine GOUTHERET essaie sans succès de reprendre l’observatoire avec le groupe franc du lieutenant HÉNARD

Touché par l’ordre de repli donné vers 9h, il franchit la passerelle sous le feu ennemi et reprend sa place sur la position de résistance.

 

A l’Ouest, la section DEISS-SPEITZ de la CM2 et le groupe franc du sous-lieutenant RICCIO contient l’ennemi qui cherche à prendre la crête 252.

 

La section de l’adjudant MULLER qui occupe les ouvrages de crêtes est encerclée et ne peut être dégagée.

 

Le commandant DOUSSET, par téléphone avec le commandement du sous-secteur, reçoit la mission de briser l’attaque sur les positions des avant-postes avant qu’elle n’atteigne les crêtes des positions de résistance,avec ordre formel de se replier sur Sarralbe avant que ses communications ne soient très gravement menacées.

 

Il a effectivement brisé l’attaque ennemie puisque qu’elle ne se renouvellera pas de la journée.

Il a tenu les positions au-delà des limites de la prudence.

 

A l’ordre de retraite, à 9h, sa droite est débordée et le capitaine GOUTHERET se replie avec mal.

Sur sa gauche, le lieutenant MEISTERMANN repasse sur la rive sud sans peine.

 

Le commandant DOUSSET, le capitaine CORNELOUP, le sergent RICCIO, le lieutenant GAITTE protègent le mouvement.

 

Le commandant passe la passerelle le dernier, debout, en képi, sous le feu des mitraillettes à courte distance.

Il offre un exemple inoubliable de maîtrise de soi et d’intrépidité.

 

Les passerelles sont détruites derrière lui.

 

Près de la cote 252, 8 hommes du CM3, caporal STEINMETZ, n’ont pas été atteints par l’ordre de repli.

Encerclé, il tiendra sept heures, avec un tué, trois blessés, et épuisera ses munitions.

 

Le soldat MARGENON, voyant un allemand hisser sur la maison le drapeau hitlérien, l’abat d’un coup de feu.

 

La section de la Tuilerie est restée cernée dans l’usine Solvay.

Le caporal-chef EXCHENNE traverse la Sarre à la nage et vient demander de l’aide au lieutenant POTONNE de la CMIC, installé près du pont détruit de la voie ferrée.

POTONNE lance le départ du sauvetage du groupe encerclé.

Le caporal BOUDON ramène en barque un caporal et quatre hommes.

Grièvement blessé, il part à la dérive et est sauvé par le soldat HÉNARD qui ramène la barque à la rive.

La section POTONNE subit des pertes, riposte au feu des occupants de la cité Solvay, bombardée par les mortiers du capitaine DURUPT.

 

11 Heures. Nouvelle préparation d’artillerie sur les 1er et 2ème bataillons.

Ils sont rapidement survolés par des escadrilles de Stukas.

 

Les avions lancent d’abord des tracts, demandant de cesser le combat, puis bombardent les PC des ponts, les positions des batteries du groupe polonais, les principaux ouvrages, les routes et les villages.

Peu importunés par la DCA, réduite à des mitrailleuses, ils opèrent méthodiquement et en toute tranquillité.

 

50 avions traitent Sarralbe, autant sur le 2ème bataillon.

 

Trois par trois, les avions se succèdent sur le barrage de l’Albe et lancent chacun trois bombes.

Les dégâts sont très importants.

A Sarralbe, un bloc de 120 tonnes bascule sous le coup d’une seule torpille.

A Guéblange, 3 abris sur 4 du PC II/51 sont atteints, celui des télégraphistes est écrasé par une torpille.

Tous les occupants sont tués.

 

Vers 14h30, début d’une deuxième attaque sur Moderbach.

Elle est plaquée au sol par des CM5 et 6.

Ils ne recommenceront pas de la journée.

Tous les mouvements de l’ennemi sur les glacis face au II/51 sont sous le feu de nos mitrailleuses et de nos mortiers.

 

Des tirs de l’artillerie ennemie durent toute l’après-midi, puis, à 18h30, se fait une 3ème préparation d’artillerie.

On sait par une relation allemande qu’un troisième bataillon a été mis en place et que la 3ème attaque projetée fut remise au lendemain.

 

La journée se solde sur le sous-secteur de Sarralbe par un incontestable échec de l’attaque ennemie.

 

Le III/51 n’a pas été attaqué.

En prévision du départ, ses avant-postes ont été retirés de Saint Michel.

Ont été inondés 3 mitrailleuses et les mortiers aux lisières, dans les bois.

La section CMIO a repoussé des canots qui cherchaient à s’approcher de la rive sud de la Sarre entre Schwangenwald et Herbitzhorn.

 

Vers 13h, le commandant du sous-secteur transmet aux chefs de section l’ordre de retraite.

A 18H, l’ordre atteint les compagnies.

Vivres et munitions sont immergés, les matériels lourds sont mis hors service.

Le Génie prépare la destruction des ponts encore existants.

 

Le mouvement de retraite commence vers 21h.

 

Sur tout le front, les unités se replient en silence.

Sur les fronts du 1° et du 2° bataillons, il n’y a pas de problèmes.

 

C’est beaucoup plus périlleux sur le front du 2ème bataillon.

L’ennemi est au contact étroit. On se bat à la grenade dans l’obscurité.

 

A 24h, l’évacuation est terminée dans des conditions assez favorables.

Les derniers ponts tombent vers deux heures du matin.

 

Les éléments laissés au contact restent seuls. : II/51, commandés par le lieutenant LAMBLEZ, I/51, lieutenant MARTRES aux lisières de Sarralbe, III/51, Sergent MOSÉLI et LERAT à Barbizhet et au barrage.

 

Tout ce qui précède était exclusivement consacré à la journée du 14 juin 1940 et à la résistance acharnée du 51°RIC.

 

Puis commence la retraite sur le canal de la Marne au Rhin (les 15 et 16 juin 1940).

 

Le chef du 51° RIC en 1939/1940 fut le colonel REVIERS de MAUVRY.

 

Le 3° bataillon du 51° RIC était commandé  par le commandant BONHOMAN, puis par le capitaine CAUZE de NEZELLE.

 

RETOUR