BADONVILLER et les CARRIERES de BREMENIL

 

Le 17 novembre 1944 au matin, Badonwiller, gros bourg, carrefour important pour la conquête de l’Alsace, est pris par le Sous-Groupement DE LA HORIE, composé en particulier de la 3ème Compagnie du 501ème R.C.C. et d’une Compagnie d’Infanterie. De nombreux prisonniers sont faits, mais nous perdons un char de la 1ère section, le ‘’MORT – HOMME’’ de mon ami BENARD blessé pour le deuxième fois.

 

Au courant de l’après-midi, le Commandant DE LA HORIE me charge de me porter à l’Est et de tenter une percée en direction des CARRIERES de BREMENIL, sur la route de CIREY sur VEZOUZE, point de départ prévu pour le franchissement des Vosges.

 

N’ayant aucun moyen de reconnaissance, je me présente en tête avec mon char, le ‘’HARTMANNSWILLERKOPF’’ revenu de réparation, avec comme radio-chargeur André RINGENBACH, Alsacien, originaire de la région de THANN. Je dépasse les premières maisons des CARRIERES, accompagné d’une section d’infanterie du IIIème R.M.T. qui nous éclaire en faisant des patrouilles à gauche et à droite de la route située au fond d’une petite vallée escarpée et boisée.

 

Les fantassins me signalent des canons antichars à notre gauche, qui sont pointés vers le premier carrefour de BREMENIL. Mon char est stoppé à trente mètres du carrefour, le char d’appui à 50 mètre derrière moi. Au même moment j’entends un sifflement bizarre. Mon tireue CHAUVET aperçoit une petite flamme d’un départ, tire immédiatement à cet endroit, où se trouve un canon minuscule de 25 mm, avec des roues en bois (sans doute un canon russe). Il le pulvérise, ainsi que sont servant, dissimulé sous une toile de tente qui couvrait le tout. Immédiatement après, je me rends compte que mon périscope de tourelle a été coupé net par l’obus, à 20 cm de ma tête. J’ai réalisé que l’Allemand visait bien ma tête, comme toujours, hors de la tourelle !

   Quelle chance ce jour là.

 

Quelques minutes plus tard, nous entendons une grande clameur ; C’est une Compagnie d’infanterie qui dévale du versant droit de la vallée en hurlant dans une langue inconnue, et en tirant au hasard devant eux avec armes automatiques, occasionnant un certain affolement et de lourdes pertes pour nos Camarades du R.M.T.

 

Pour nos chars, la situation n’est guère enviable car nous redoutons des tirs de bazooka. Vraisemblablement, cette compagnie n’en était pas dotée. Par la suite, nous avons appris qu’il s’agissait d’une compagnie de Cosaques, armés de P.M. Kalachnikof soviétiques, armes totalement inconnues pour nous, mais particulièrement efficaces.

 

A la tombée de la nuit, je reçois l’ordre de me replier sur le hameau des CARRIERES et de mettre en place une garde renforcée.

 

La nuit est calme, les patrouilles du R.M.T. ne signalent pas de mouvement suspects. Les attaquants de la veille se sont repliés, emmenant leurs morts. Dans la matinée les chars vont l’un après l’autre dans le centre du hameau faire le plein de gas-oil.

 

Au court de cette opération de routine, un violant tir de mortiers de gros calibre se déclenche sur les CARRIERES. Le commandant DE LA HORIE est tué, ainsi que le Capitaine MAZIERAS du III/R.M.T. BRANET, mon capitaine, est blessé d’un éclat à la tête.

Moi même, je suis blessé dans la tourelle du char.

 

Au moment où je revenais, après avoir fait le plein, à mon emplacement de la nuit, un obus tombe sur la maison contre laquelle le char était abrité et fait éclater le mur. Je reçois sur la tête une grosse pierre de taille et me retrouve assommé, dans une flaque de sang, au fond de la tourelle. Je suis soigné dans les minutes qui suivent. Une plaie sur le crâne, une très vive douleur dans la tête, mais apparemment rien de cassé. Je refuse de me faire évacuer (l’Alsace est trop proche). Accueilli dans une maison voisine, j’ai pu passer la nuit suivante dans un vrai lit !

 

Le 19 au matin, la route de CIREY est ouverte par les automitrailleuses des spahis, qui ne rencontrent que peu de résistance et n’ont pas de pertes. Les canons antichars signalés l’avant veille sont retrouvés intact à CIREY.

Tous mes remerciements 
Au capitaine Christen -Marcel , pour le prêt et l’exploitation de ses mémoires et documents extraits de sa collections personnelles.

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