Historique de la bataille de Bazeilles
Situer Bazeilles

Pour la première fois dans l’histoire des troupes de Marine, dont la création remonte à 1622, quatre régiments de marche : 1er, 2e, 3e et 4e RIMa
(« Marsouins » et « Bigors ») sont réunis pour constituer la division d’Infanterie de Marine, baptisée « Division Bleue ».


L’héroïsme des marsouins de la division bleu dans la défaite de Sedan, 1870 :     D'abord destinée à un débarquement de diversion sur la Baltique, les défaites en Alsace font que la Division bleue rejoint le 12 août 1870 le Corps que le maréchal Mac Mahon forme à Chalons. Elle constitue la 3ème division du 12ème Corps Français  

Le 21 août, les troupes s'ébranlent en direction de Reims . Le 27, Mac Mahon décide de s'installer défensivement autour de Sedan. La Division bleue reçoit l'ordre de se porter sur Sedan depuis Vaux. 

La première brigade arrive le 31 août . Elle a pour mission de surveiller les hauteurs de Remilly et d'Aillicourt, quant à la deuxième brigade, à peine a-t-elle traversée la Givonne et s'est-elle engagée dans Bazeilles qu'elle est prise sous le feu de l'artillerie Prussienne qui ne lui laisse aucun répit. 

Les deux régiments de marsouins se déploient aussitôt mais ils reçoivent l'ordre de poursuivre et d'aller s'installer sur les hauteurs de la Moncelle. Pendant ce temps, le 34ème de ligne est bousculé par les Bavarois qui prennent pied dans la localité. 

Le général de Vassoigne ordonne à la brigade Martin des Pallières de faire demi-tour et de reprendre la position. Entraînés par leur général, les marsouins des 2ème et 3ème de marine chargent à la baïonnette au son du clairon. Malgré les salves nourries de l'ennemi, ils repoussent les Bavarois des 2ème et 11ème de ligne jusqu à la Meuse. 

Bazeilles est repris pour la première fois. 

Dans le village la lutte fait rage, les renforts ennemis ne cessent d'arriver, malgré la rage des marchions, la lutte devient inégale. Vers 16h, la 2ème brigade entame son repli jusqu au cabaret Bourgerie . 

Le général de Vassoigne engage alors sa 1ère brigade de marsouins . Au signal, comme la 2ème brigade, elle se rue à l'assaut, refoulant les Bavarois à la baïonnette jusqu'au bas du village, puis l'acculant à la Meuse tout en faisant 300 prisonniers. 
VASSOIGNE, né à Fort Royas (Martinique) le 8/5/1813
Il est 17h le 31 août 1870, les marsouins sont maîtres du terrain, Bazeilles est repris pour la deuxième fois. 

A la nuit tombée, le général de Vassoigne confie la défense de Bazeilles au commandant Lambert et replie l'essentiel de ses troupes sur les hauteurs de Balan et de la Moncelle. 

Surpris par cette résistance, les Bavarois décident de tourner ce point d'appui . Le 1er septembre vers 4h30, l'affrontement reprend, plus farouche que jamais. Mais si la nuit a favorisé les entreprises de l'ennemi, elle a aussi permis au commandant Lambert de s'organiser solidement dans la partie nord du bourg. 
Commandant Lambert-Arsène est né à Carhaix (Finistère) en 1834-C'est lui qui organise et assume la défense de la maison Bourgerie, le 1er septembre 1870.
Les premières charges des Chasseurs Bavarois sont cueillies à la baïonnette par les marsouins . On ne se fait pas de quartier, les blessés n'ont aucun refuge. Les compagnies Pommerelle et Guillery du 3ème de Marine et Clercant du 4ème rivalisent d'héroïsme . 

Pour la troisièmes fois, Bazeilles reste au mains des marsouins de l'infanterie de marine. 

Mais pour demeurer maître de la situation, le général commandant la division se voit contrai d'engager la totalité de ses troupes. C’est alors une succession de combats de rue . A aucun moment les marsouins ne lâchent prise, fidèles à la mission reçue. 

Mais le général Ducrot, qui a succédé à Mac Mahon, prescrit la retraite sur le plateau d'Illy . Aussi vers 8h30, la Division bleue évacue Bazeilles et se replie vers Givonne. Survient un véritable coup de théâtre, le général Wimpfen se prévaut d'une lettre de commandement du ministre de la guerre le nommant à la tête de l'armée Française . 
Général Auguste-Alexandre Ducrot (1817-1882)
Fort de ce document, il enjoint de réoccuper les positions initiales. Pour la Division bleue, il s'agit de reprendre une nouvelle fois Bazeilles. 

Le général de Vassoigne lance à nouveau ses quatre régiments de marsouins à l'assaut d'un ennemi solidement retranché dans le village. 

Après un premier échec, pour la quatrième fois, ils pénètrent dans Bazeilles. C'est à nouveau une lutte sans merci, au corps à corps, à l‘arme blanche . 

De cette geste épique, on ne peut citer tous les actes de bravoure. A l'actif du 3ème de Marine, la belle défense de la villa Beurmann, à l'entrée du chemin menant à la Moncelle, celle d'une autre maison située à l'angle de deux rues au centre de Bazeilles. 

C'est aussi dans cet affrontement que se situe l'épisode de la maison Bourgerie. Ici, aux lisières nord du village, une centaine de marsouins du 2ème régiment avec quelques isolés des autres régiments vont se sacrifier pour couvrir la retraite de l'armée vers Sedan. 

Après plusieurs heures d'un combat acharné , à un contre dix, la quasi-totalité des défenseurs étant tués ou blessés, les officiers encore valides réclament l'honneur de brûler les onze dernières cartouches. Le capitaine Aubert tirera la dernière. Les quelques survivants, dont le Cdt Lambert, seront épargnés et se verront rendre les honneurs. 

A la fin de cette tragique journée du 1er septembre, la Division bleue regroupée à Sedan effectue une ultime tentative en direction de Balan. 

Mais l'ennemi, un moment surpris, se ressaisit et, le 2 septembre 1870, c'est la capitulation de Sedan. 

En 36 heures de combat, la division d'infanterie Française de marine eut 2655 tués, blessés ou disparus, dont 100 officiers et 213 sous-officiers. Quant aux pertes Bavaroises, un ouvrage Allemand écrit:" nous avons laissé à Bazeilles, les 31 août et 1er septembre 7000 des nôtres ". 

A coup sur, l'infanterie de marine n'aura pas capitulé sans combattre. Gallieni ( celui de la Marne en 1914 ) pourra affirmer dans sa lettre du 4 septembre: " Tous, nous marchons le front haut, et nous disons : nous ne sommes pas de la capitulation de Sedan ". 

_ 14-18, la revanche des marsouins : 

Les marsouins, ayant déjà démontré toutes leur capacités combatives lors du fameux combat de Bazeilles, vont de nouveau s’avérer d’excellentes troupes offensives pendant le dur conflit de 14-18 . 

Ils s’illustrèrent tout d’abord lors de la victoire de la Marne en 1914 . Plusieurs brigades furent affectés à la fébrile 9eme armée Française mais commandée par Foch. Les marsouins s’illustrèrent tout d’abord en arrêtant plusieurs assauts de la Garde Prussienne dans les fameux marais de St-Gond, contribuant ainsi à la très pénible résistance de l’armée Foch . 

En 1915, le généralissime Joffre met en place de grandes offensives afin de soulager le front Russe, à deux doigts de s’écrouler sous les coups de boutoirs des armées Allemandes d’Hindenburg et de Ludendorff . 

Nos marsouins seront très activement engagés lors des combats offensifs de Champagne . L’offensive Française permettra de s’enfoncer dans les lignes Allemandes en capturant 10 km de tranchés mais la percée ne parviendra pas du fait du manque de munitions en artillerie lourde . 

Nos marsouins combattent avec adresse et bravoure : ils capturent plusieurs centaines de mitrailleuses et canons Allemands à coups de grenades, lorsque le danger des mitrailleuses est éliminé, ils bondissent hardiment dans les tranchées boches et jouent habilement de l’arme blanche, les tranchées sont ainsi conquises . 

En 1916, c’est l’année de la Somme et de Verdun . 

Après la phase défensive de la bataille de Verdun, les Français passent à la contre-offensive et récupère tout le terrain perdu depuis le début de la bataille . C’est ainsi que Fleury est repris le 18 août, Douaumont le 24 octobre et enfin Louvremont le 15 décembre 1916; complétant ainsi la victoire Française de Verdun . 

Lors de ces offensives, les marsouins du Régiment d’infanterie colonial du Maroc ( R.I.C.M.) s’illustrent . Ce fameux régiment, qui est de loin de le plus décoré de France, n’était pas composé d’élément Marocains mais de marsouins Parisiens, Gascons, Provençaux, Bretons s’étant illustré lors de campagnes colonial au Maroc, d’où le nom du régiment ( voir les commentaires de Gaston Gras, ancien marsouin de ce régiment et ayant écris un ouvrage sur la reprise de Douaumont, opération auquel il prit part ) . 

Quelques noms de marsouins du R.I.C.M, laissons parler l’ancien marsouins Gaston Gras dans ses ouvrages sur Douaumont et la Malmaison : 

« Et mes hommes, mes frères d’armes, ma fine équipe d’Auvergnats : Auray, Aupetit, Berthon, tous trois de la classe 16, venus avec moi de la Valbonne au R.I.C.M. Des vieux, malaxés par l’existence, le regard rêveur, reporté parfois sur le passé ou sur la famille: les marsouins Garrigues, Mazé, Matherat, Favier, Pillais . Un corse, Xéri . Des jeunes marsouins : Fauret, Gascon, Gaudet, de Juvisy; Barlet de l’Aude, C....., de Belleville, qui est venu racheter cinq ans de travaux publics; Broudic, breton; Renou, limousin; Micou, bon paysan tout rond; Gonot, équivoque; Ramette, de Lille; Feuillard, normand; Bourrely, varois; Gaudichons, rouspéteur, « chante et bois comme la mère Gaudichon »; Imbert, cuistot quadragénaire; Duros, insignifiant; le bruyant Casenave, de Carcassone et Teyssier, jeune clairon provençal, plein d’élegane et d’allant . » 

Ce sont les marsouins du R.I.C.M. qui reprennent Fleury le 18 août 1916 . Ce village avait été pris et repris à seize reprises mais un dernier assaut des marsouins fut fatal pour les Allemands . Chaque maison, chaque trou d’obus fut repris à coups de grenades et de couteaux . Les pertes s’accumulent à 453 tués ou blessés pour le régiment . Il reçoit tout naturellement une citation . 

Lors de l’offensive victorieuse du 24 octobre, ce sont encore les marsouins du même régiment qui reprennent pied, en compagnie d’un régiment de ligne, sur le fort de Douaumont . Selon Gaston Gras, ancien marsouin de l’assaut, « De toutes parts maintenant, de toutes les issues de cet énorme terrier, sortent des soldats Allemands qui tentent de résister; mais que peuvent-ils ? Nos Poilus les lardent de coups de baïonnettes, les mettent en pièces à coups de grenades, et leurs armes automatiques s’établissent devant tous les débouchés : le boche est tenu à la gorge, pris dans une souricière sans merci; force lui est d’y rester jusqu’à ce qu’arrivent les nettoyeurs français avec leur matériel . Le 1er bataillon couronne le Fort de Douaumont : des hommes s’agitent sur la crête, et de Souville, on les aperçoit, on comprend que la victoire est acquise . ” 

Le succès offensif de Douaumont vaudra aux marsouins la citation suivante : 

“ Le 24 octobre 1916, les marsouins du R.I.C.M., renforcé du 43eme b.t.s, a enlevé, d’un admirable élan, les premières tranchées Allemandes, a progressé ensuite sous l’énergique commandement du lieutenant-colonel Régnier, brisant les résistances successives de l’ennemi sur une profondeur de deux Km; a inscrit une page glorieuse à son histoire en s’emparant dans un assaut irrésistible du fort de Douaumont et en conservant sa conquête malgré les contre-attaques répétées de l’ennemi .” 

Les marsouins feront 5000 prisonniers Allemands et auront à déplorer la perte de 852 tués ou blessés . Les marsouins du même régiment participent également à l’offensive victorieuse de Louvremont ( 15 décembre ) et perdent encore 129 tués, 462 blessés et 136 disparus . Les exploits de Fleury, Douaumont et Louvremont donneront au régiment trois nouvelles citations à l’ordre de l’armée .. 

Les marsouins appartenant à d’autres régiments s’illustreront également dans la coûteuse offensive de la Somme aux côtés des Britanniques . 

L’année 1917 sera ponctuée par de nombreux combats offensifs, notamment sur l’Aisne et encore à Verdun . 

En juin 1917, à Cerny, les marsouins R.I.C.M. rétabli une situation compromise. 
Le soldat et marsouin Cauchois reprend seul, à la grenade, une tranchée momentanément perdue, et y trouve la mort. 

Le 24 octobre 1917, date anniversaire de la reprise de Douaumont, les marsouins du même régiment se battent sur le chemin-des-dames . On leur confie la mission périlleuse de reprendre le fort de la Malmaison et l’effectuent avec brio . 

Lors de l’assaut, les marsouins doivent progresser de tranchées en tranchées sous le feu de l’artillerie ennemie, ils enfoncent les lignes de la Garde Prussienne et reprennent pied à l’ouest du fort de la Malmaison . Tous les objectifs sont remplis et une nouvelle citation vient couronner l’exploit . Le brave régiment déplore la perte 
de 525 tués ou blessés, et fait 950 prisonniers Allemands valides dont 14 officiers de la Garde prussienne.

 

La citation sera la suivante : 

« Régiment d’élite, sous l’énergique commandement du lieutenant-colonel Debailleul, a, le 23 octobre 1917, par une manoeuvre audacieuse, difficile et remarquablement exécutée, encerclé et enlevé de haute lutte les carrières de Bohéry, s’est emparé ensuite des lignes de tranchées du Chemin des Dames que la Garde Prussienne avait l’ordre de défendre à tout prix, puis progressant encore sous un feu violent d’artillerie et de mitrailleuses sur une profondeur de 2 Km et demi, malgré des pertes sensibles, a atteint, avec un entrain admirable, tous les objectifs, infligeant à l’ennemi de lourdes pertes, capturant 950 prisonniers dont 14 officiers, 10 canons dont 8 de gros calibres et un nombreux matériel de guerre . » 

L’année 1918 sera l’année de la victoire et des plus beaux exploits offensifs des marsouins de plusieurs régiments dont naturellement le fameux et immortel R.I.C.M.. De nombreuses victoires offensives seront remportées par les marsouins du régiment : Plessier-de-Roye, Mont-de-Choisy, Parcy-Tigny, Lombray-Gizaucourt, Crecy-au-Mont, Butte-du-Mesnil, Grateuil, l’Argonne ....En moins d’un an, 100 canons, 600 mitrailleuses et 5000 prisonniers Allemands capturés; cinq nouvelles citations à l’ordre de l’armée .. 

Les marsouins vont tout d’abord repousser une forte offensive Allemande au Plessier-de-Roye, du 28 au 30 mars 1918, empêchant ainsi Ludendorff de séparer et d’isoler l’armée Britannique de l’armée Française . Les pertes s’élèvent à 160 tués ou blessés pour les marsouins mais le régiment a capturé 785 prisonniers Allemands . Nouvelle citation .. 

Au mont de Choisy, de juin à juillet, les marsouins du même régiment résistent aux furieux assauts Allemands et déplorent la perte de 359 tués ou blessés . Cependant le régiment tient sa position . 

Après l’échec de la dernière offensive Allemande de Ludendorff en Champagne contre la 4eme Armée Française, Foch passe à la contre-offensive . C’est la seconde offensive et victoire de la Marne, le 18 juillet 1918, les 10eme, 5eme et 6eme Armées Françaises ( accompagnées de quelques divisions Britanniques et Américaines ). réduisent toute la poche de Château-Thierry . Les marsouins du R.I.C.M. s’enfoncent héroïquement dans les lignes Allemandes, sans appui de chars et capturent 8 Km de tranchées mais il perd 754 soldats . Nouvelle citation .. 

Du 20 août eu 4 septembre 1918, les marsouins du même régiment enfoncent 14 Km de tranchées Allemandes, l’Ailette est promptement franchis . Les marsouins soulignent cette nouvelle victoire par la capture de 1100 prisonniers Allemands mais perdent de nouveau 547 tués . Nouvelle citation .. 

Le 25 septembre 1918, sur la Butte du Mesnil, les marsouins du R.I.C.M. atteignent tous leurs objectifs et capturent 934 prisonniers Allemands mais déplorent une perte de 604 tués . Nouvelle citation avec en prime le droit de porter la double fourragère aux couleurs de la légion d’Honneur et de la croix de guerre . 

Enfin, l’Argonne ou les marsouins du R.I.C.M. force le passage et font 210 prisonniers Allemands pour une dernière citation, la 10eme ! 

Le R.I.C.M. aura perdu 15 000 tués pendant tout le conflit, ce qui représente tout de même un gros sacrifice . Cependant le rôle joué par les autres régiments de ligne n’est pas à négliger puisque lors des offensives victorieuses de Foch en 1918, pas moins de 130 000 Français furent tués . Pendant toute la guerre ce sont 1 375 000 Français qui meurent en première ligne .. 

Les marsouins, appartenant à d’autres régiments de l’infanterie Française de Marine, se distingueront également comme d’excellentes troupes d’attaques pendant la victorieuse offensive de l’armée d’Orient commandée par Franchet d’Esperey . Les marsouins emporteront de haute lutte le Drobopolje après avoir nettoyés nids de mitrailleuses et tranchées à coups de grenades, de revolver et de couteaux ..

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